BERKELEY LENNOX (1903-1989)
« Compositeur anglais appartenant à la même génération que Walton et Tippett, [Lennox Berkeley] ne s'inscrit pas de manière évidente dans les traditions nationales représentées par ces derniers ou, auparavant, par Elgar et Vaughan Williams. C'est en partie en raison de son ascendance française et de ses affinités avec la France, qui le font sembler plus proche de Fauré, ou de Ravel et de Poulenc, qui étaient ses amis. » Ces mots du compositeur et musicologue britannique Peter Dickinson résument parfaitement la personnalité et le style de Lennox Randall Francis Berkeley, né à Boars Hill (Oxfordshire) le 12 mai 1903, dans une famille aristocratique : son grand-père paternel, George Lennox Rawdon, septième comte Berkeley et vicomte Dursley, avait épousé Cecile, fille d'Edward Drummond, comte de Melfort, issu d'une famille d'origine française et écossaise ; mais son fils aîné, le capitaine Hastings George Fitzhardinge Berkeley, né avant le mariage de ses parents, ne pourra hériter du titre et des privilèges qui auraient pu échoir à son fils unique Lennox.
Bilingue dès son plus jeune âge, Lennox Berkeley passe souvent ses vacances en France dans la famille de sa mère, qui s'y est établie. Son père lui fait écouter sa collection de rouleaux de piano mécanique, et veille à ne pas entraver le développement d'un esprit qu'il sent différent du sien et dont il sait solliciter la curiosité sans en altérer l'originalité. Lennox Berkeley reçoit une double formation, littéraire et musicale. En 1922, il part au Merton College d'Oxford, où il étudie la littérature française et la philologie. C'est dans cette même université qu'il reçoit quelques cours d'orgue auprès de William H. Harris. Très vite, il s'essaye à la composition.
Sur la recommandation de Maurice Ravel, à qui il a présenté une de ses œuvres en 1922, à Oxford, Berkeley part pour Paris afin d'étudier auprès de Nadia Boulanger. La grande pédagogue lui apprend l'harmonie, le contrepoint et l'analyse musicale. À Paris, Berkeley fréquente un cénacle d'artistes : Ravel, à qui il rend régulièrement visite, Stravinski, Milhaud, Honegger, Roussel, Poulenc... En 1928 se produit un événement qui sera riche de conséquences sur sa vie et son œuvre : il se convertit au catholicisme. Les thèmes religieux vont dès lors acquérir une grande importance pour Berkeley.
De retour à Londres en 1935, il fait l'année suivante une rencontre décisive, celle de Benjamin Britten, lors du festival de Barcelone de la Société internationale de musique contemporaine (S.I.M.C.) : Berkeley y présente son Ouverture opus 8 et Britten sa Suite pour violon et piano opus 6. Les deux compositeurs se lient d'amitié, et décident de composer ensemble Mont Juic (opus 9 de Berkeley, opus 12 de Britten), une suite orchestrale de danses catalanes (1937) ; cette partition, mélange étonnant de styles populaires et savants, trouve son unité musicale dans le procédé d'annonce et de répétition des thèmes orchestraux et dans celui de la transformation thématique. Mais la collaboration entre les deux compositeurs ne se passe pas sans difficulté, Berkeley trouvant Britten quelque peu fermé dans sa manière de penser la musique. Il est vrai qu'il avait rencontré en France un esprit nouveau où triomphait la ligne mélodique et où régnait audace, spontanéité et sincérité, loin des conventions d'écoles et des formules harmoniques éprouvées.
Berkeley affirme son style et connaît ses premiers succès avec la Sérénade pour orchestre à cordes opus 12 (1939), la Première Symphonie opus 16 (1940) et le Divertimento pour orchestre opus 18 (1943). S'inscrivant dans la continuité historique – il rend hommage, dans ces œuvres, aussi bien à Bach, à Mozart et Haydn qu'à Poulenc –, adoptant des formes classiques, il[...]
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Écrit par
- Juliette GARRIGUES : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)
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