FRESNEL LENTILLE DE

La lentille à échelons a été mise au point par l’ingénieur français Augustin Fresnel (1788-1827) au début des années 1820 pour améliorer l’efficacité des phares maritimes, et donc la sécurité de la navigation en mer. Appelé couramment lentille de Fresnel, ce dispositif optique permet, à partir d’une source lumineuse ponctuelle, de créer un faisceau de rayons parallèles. Le premier système de ce type est installé sur le phare de Cordouan, à l’embouchure de la Gironde, en juillet 1823. Cette innovation capitale, apportant régularité et puissance aux faisceaux de lumière, sera rapidement mise en œuvre sur tous les phares maritimes, avant d’être appliquée à bien d’autres usages.

La lentille à échelons, une innovation majeure

Augustin Fresnel arrive à Paris en 1819, à l’instigation de son ami François Arago (1786-1853), pour travailler à la Commission des phares, organisme créé en 1811 dans le but de développer un système général d’éclairage des côtes de France. Polytechnicien et ingénieur des Ponts et Chaussées, Fresnel conçoit rapidement une optique lenticulaire, système dont il ne revendique pas la paternité, mais qui n’était jusque-là utilisé qu’en laboratoire. Dans son Mémoire sur un nouveau système d’éclairage des phares, lu à l’Académie des sciences le 29 juillet 1822, il précise : « C’est Buffon qui a imaginé le premier les lentilles à échelons, pour augmenter la puissance des verres ardents en diminuant leur épaisseur. » Georges Louis Leclerc, comte de Buffon (1707-1788), et à sa suite d’autres naturalistes, utilisent ce procédé pour concentrer les rayons du soleil en un point focal afin d’obtenir de hautes températures et faire des expériences de combustion de différents matériaux. Augustin Fresnel a l’idée d’inverser le dispositif et d’exploiter le principe des lentilles à échelons pour créer un faisceau de rayons lumineux parallèles à partir d’une source placée au foyer d’une lentille.

Dans une simple lentille plan-convexe, les rayons lumineux partant de la source sont rendus parallèles après avoir traversé la lentille de verre de profil sphérique. Lorsque, pour des usages de forte puissance, le diamètre de cette dernière atteint plusieurs dizaines de centimètres, certaines difficultés apparaissent : la masse de la lentille s’accroît exagérément, sa fabrication devient plus délicate et l’épaisseur du verre provoque un affaiblissement notable de la clarté. Fresnel remédie à ces problèmes en décomposant la lentille en un grand nombre d’anneaux prismatiques assemblés par collage ou, dans le cas des lentilles de phares, sertis dans des supports métalliques.

Grâce à cette innovation, il allège le dispositif et améliore le rendement lumineux. Il décrit clairement son système dans son Mémoire de 1822 : « Mais si l’on divise celle-ci [la lentille plan-convexe] en anneaux concentriques, et qu’on ôte à la petite lentille du centre et aux anneaux qui l’entourent toute la partie inutile de leur épaisseur, en leur en laissant seulement assez pour qu’ils puissent être unis par leurs bords les plus minces, on conçoit qu’on peut également obtenir le parallélisme des rayons émergents partis du foyer. »

Pour fabriquer ces optiques lenticulaires dont le diamètre peut atteindre 90 centimètres, Fresnel fait appel à un constructeur d’instruments scientifiques réputé, François Soleil (1775-1846), qui confectionne déjà pour Arago et d’autres membres de l’Académie des sciences des instruments d’optique de précision. Entre 1820 et 1823, Soleil doit mettre au point les procédés de fabrication adaptés à la dimension des optiques de phares, tant pour couler le verre dans de grandes lingotières de fonte que pour le polir sur des tours de polissage imposants. De son côté, Fresnel négocie avec la manufacture de Saint-Gobain la fourniture de verre de type [...]