CASTELLI LEO (1907-1999)
Né en 1907 à Trieste, le marchand d'art Leo Castelli a vécu en Europe jusqu'en 1941, année de son exil aux États-Unis. Installé à New York, il fréquente assidûment le musée d'Art moderne et la galerie de Peggy Guggenheim Art of this Century. Proche des artistes surréalistes réfugiés à New York, Castelli rencontre aussi de jeunes peintres américains comme Jackson Pollock, Willem De Kooning, Franz Kline ou Mark Rothko. À leurs yeux, Castelli n'est alors qu'un simple collectionneur. Pourtant, il va progressivement participer à des expositions où il confronte la jeune peinture américaine à celle de ses aînés européens, jusqu'à un événement marquant pour l'expressionnisme abstrait, le Ninth Street Show en 1951. En 1957, Castelli installe sa galerie dans son appartement, recherchant de jeunes artistes à exposer. L'expositionJasper Johns, en 1958, déclenche à la fois l'étonnement et l'enthousiasme du grand public, de la critique et des acheteurs. La même année, l'exposition des combine-paintings de Robert Rauschenberg crée aussi l'événement malgré certaines réticences de la critique. Suivront Frank Stella et ses black paintings en 1961, Roy Lichtenstein et ses vignettes de bandes dessinées agrandies en 1962. Castelli sonne ainsi le glas de l'expressionnisme abstrait. Malgré quelques critiques acides visant l'ascension fulgurante de la galerie, dont certains artistes largement plébiscités par le public furent regroupés sous le label pop art, Castelli sut soutenir l'éclosion plus difficile d'autres mouvements comme l'art minimal (apparu en 1963 et présenté dès 1966 par sa galerie) et l'art conceptuel, né vers 1966-1967.
À partir des années 1980, la célébrité de Castelli continue de s'affirmer et sa galerie devient un lieu incontournable.
Marchand d'art indissociable de ses artistes, Leo Castelli n'est pas sans évoquer, dans le soutien qu'il leur dispense, Ambroise Vollard quand ce dernier défendait Cézanne, Gauguin ou Picasso à ses débuts. Comme Vollard, Castelli a su faire évoluer le rôle du marchand d'art. Alors qu'il aurait pu se contenter de représenter des artistes, comme De Kooning ou Kline, qui le pressaient d'ouvrir une galerie au début des années 1950, il a pris le risque de soutenir de jeunes artistes presque inconnus.
Si certaines expositions ont connu un retentissement immédiat comme celle de Jasper Johns, d'autres artistes ont eu un « démarrage » plus difficile, mais Castelli tint bon. Il versait des mensualités aux artistes (sortes d'avances sur leurs futures ventes) ; ce système pratiqué en Europe était inconnu aux États-Unis. Castelli n'hésitait pas à se mettre en avant pour promouvoir la galerie, à faire de la publicité dans les magazines, à miser sur l'accueil de la presse, et à « démocratiser » les vernissages désormais ouverts au public le samedi. En misant sur la communication, il a su profiter de l'embellie du marché et de l'augmentation du nombre de collectionneurs. Ayant compris que son activité ne devait pas se limiter à la ville de New York, il établit un réseau de galeries « amies », tout d'abord aux États-Unis puis en Europe, donnant à « ses artistes » une réputation internationale qui devait modifier le marché de l'art. Le couronnement de son engagement envers l'art américain est le grand prix de Peinture de la 31e biennale de Venise en 1964 remis pour la première fois à un artiste américain, Robert Rauschenberg.
Jusqu'à la fin de sa vie, Castelli s'est complètement investi dans l'essor de sa galerie et a développé son groupe d'artistes. Raconter l'histoire de Leo Castelli revient, en quelque sorte, à dresser un bilan de l'art américain depuis 1945.
Bibliographie
A. Cohen[...]
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Écrit par
- Bénédicte RAMADE : critique d'art, historienne de l'art spécialisée en art écologique américain
Classification
Média
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