SUENENS LÉON-JOSEPH (1904-1996)
Figure éminente de l'Église de Belgique, Léon-Joseph Suenens, distingué très jeune par le cardinal Mercier, lui doit de pouvoir effectuer à l'Université grégorienne de Rome des études de philosophie, de théologie et de droit canon. Ordonné prêtre le 4 septembre 1927, il commence sa carrière dans l'enseignement avant d'être nommé en 1945 évêque auxiliaire et vicaire général de l'archidiocèse de Malines. Ses premiers articles, publiés de 1934 à 1937, témoignent déjà de sa volonté de participer au renouveau œcuménique, au mouvement liturgique et aux nouvelles orientations en ecclésiologie, dans la ligne tracée à l'époque par Dom Lambert Beaudouin. Les mêmes préoccupations s'affirmeront à nouveau à l'occasion du IIe concile du Vatican.
L'apostolat marial est la deuxième orientation majeure de sa vie. Il défend notamment ce mouvement d'origine irlandaise contre l'hostilité que celui-ci connaît alors en France. Sa rencontre avec Véronique O'Brien en 1948 le marque profondément ; leurs rôles respectifs au sein de la Légion de Marie les rapprochent encore ; il lui rendra hommage en 1993 dans son ouvrage Les Imprévus de Dieu en la désignant comme la « grâce spirituelle de sa vie ».
Après le décès du cardinal Van Roey, le pape Jean XXIII nomme, le 7 août 1961, Mgr Suenens administrateur apostolique de l'archidiocèse de Malines, puis le 24 novembre 1961 archevêque de Malines-Bruxelles (l'ancien diocèse d'Anvers étant rétabli à la même date). Son style rompt avec celui de son prédécesseur et, contrairement à celui-ci, il se gardera de toute intervention publique dans la vie politique et sociale du pays.
Son rôle est grand lors du IIe concile du Vatican ; créé cardinal en mars 1962, il est membre du secrétariat des Affaires extraordinaires en octobre et fait ensuite partie du comité de coordination en vue de la préparation de la seconde session ; il est enfin nommé par Paul VI membre du Collège des modérateurs avec les cardinaux Agagianian, Döpfner et Lercaro. Ses interventions les plus remarquées portent sur le diaconat et sur la coresponsabilité et la collégialité dans l'exercice du ministère épiscopal.
En Belgique, il vit douloureusement les tensions internes de la conférence épiscopale lors de la controverse sur le maintien ou non dans la ville flamande de Louvain de la section française de l'Université catholique. Dans le souci de réaliser l'homogénéité linguistique de la Flandre, le mouvement flamand multiplie les manifestations en 1967 en vue d'obtenir le départ de la section française. Alors que les évêques de Belgique avaient encore affirmé leur communauté de vue, en mai 1966, en faveur du maintien de l'ensemble de l'université, ils se divisent en février 1968, de même d'ailleurs que le gouvernement et que le Parti social-chrétien. La crise sera longue et aboutira à la scission de l'université en deux institutions distinctes. C'est un déchirement pour Mgr Suenens, qui était d'origine flamande bien que de culture française.
Ses nettes mises en garde contre les risques d'une centralisation excessive du pouvoir dans l'Église, exprimées dans un entretien accordé en 1969 aux Informations catholiques internationales, seront l'objet de nombreuses critiques ; elles mettront fin, selon certains commentateurs, aux espoirs que le cardinal Suenens aurait pu avoir d'accéder à la plus haute charge dans l'Église catholique. Il abandonne cependant à partir de 1972 toute revendication en matière de fonctionnement de l'institution ecclésiale.
Sa démission en 1979 ne met pas un terme à sa vie active. Après avoir, à l'exemple du cardinal Mercier, multiplié les contacts avec les protestants, il joue un rôle de premier plan au sein du Renouveau charismatique qu'il avait appris à connaître[...]
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Écrit par
- Xavier MABILLE : président-directeur général du Centre de recherche et d'information sociopolitiques, Bruxelles
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Média