BERNSTEIN LEONARD (1918-1990)
Éclectique et indépendant
Le compositeur est aussi éclectique que l'interprète : Bernstein refusera d'adhérer à la moindre école et s'illustrera dans des genres aussi différents que la musique de films, la comédie musicale, la mélodie ou les grandes formes classiques. Sa première œuvre importante, la Sonate pour clarinette et piano (1942), fait partie du répertoire de base de l'instrument. Ses trois symphonies révèlent ses sources d'inspiration : la première, pour mezzo-soprano et orchestre, sous-titrée « Jeremiah » (1942), obtient un prix de la critique new-yorkaise en 1944 ; la Deuxième Symphonie « The Age of Anxiety », pour piano et orchestre, d'après W. H. Auden (1949, rév. 1965), brosse un panorama d'ensemble des moyens d'expression musicaux alors en vigueur ; la Troisième Symphonie « Kaddish » (1963, rév. 1977), hommage à 1'Orchestre philharmonique d'Israël, puise ses sources dans les textes de la religion hébraïque. Le Banquet de Platon lui inspire la Sérénade pour violon, qu'il dédie à Isaac Stern (1954). Sa musique religieuse révèle un homme préoccupé d'œcuménisme et de mysticisme mais qui ne renonce jamais à un sens théâtral inné, jugé parfois blasphématoire : Chichester Psalms (1965), Messe (pour l'inauguration du John F. Kennedy Center for the Performing Arts de Washington, 1971), dont il tire les Three Meditations from Mass pour violoncelle et orchestre (1977) à l'intention de Mstislav Rostropovitch.
Pour la scène, Bernstein écrit un ballet sur une chorégraphie de Jerome Robbins, Fancy Free (1944), dont découle sa première comédie musicale, On the Town, sur un livret de Betty Comden et Adolph Green, créée le 13 décembre 1944 au Colonial Theater de Boston. Toujours dans le domaine de la comédie musicale, il compose Wonderful Town, toujours avec Betty Comden et Adolph Green (1953), Candide, d'après le conte de Voltaire (1956) – dont 1'ouverture a fait le tour du monde et qu'il remanie sous forme d'opéra en 1973 –, et West Side Story (1957).
À l'opéra, il donne Trouble in Tahiti (1951) et A Quiet Place (1983-1984). Il a également écrit plusieurs ballets (Fancy Free, 1944 ; Facsimile, 1946 ; Dybbuk, 1974) et collaboré à des musiques de films (On the Waterfront, 1954).
De ses mélodies, on retiendra La Bonne Cuisine, sur des recettes d'Émile Dutoit (1947), 2 Love Songs, sur des poèmes de Rainer Maria Rilke (1949), et Songfest (1977) pour six chanteurs et orchestre. Son langage, qui emprunte au jazz, aux songs, à la musique religieuse comme à la musique populaire, à Stravinski comme à Richard Strauss, lui a permis de toucher le plus vaste public.
Le chef d'orchestre possédait un répertoire d'une richesse et d'un éclectisme étonnants. Il a tout abordé, à l'exception du dodécaphonisme. Mais c'est probablement dans la musique de Gustav Mahler que son imagination et son sens de la fantaisie sans cesse renouvelés ont trouvé leur meilleure application : « Quand j'étudie l'une de ses partitions, j'ai l'impression de l'avoir écrite moi-même. » On retrouvait une compréhension analogue face à celles de Stravinski. Bernstein était aussi un grand défenseur de la musique contemporaine, succédant dans cette voie à son maître Koussevitzky : il a créé des œuvres de Samuel Barber, Elliott Carter, Carlos Chávez, Rodion Chtchedrine, Aaron Copland, Alberto Ginastera, Hans Werner Henze, Olivier Messiaen, Francis Poulenc, William Schuman... Pour le bicentenaire des États-Unis (1976), il a dirigé dans les grandes capitales européennes une série de concerts consacrés à la musique américaine, à la tête de l'Orchestre philharmonique de New York. On lui doit aussi la redécouverte de la musique de Charles Ives, dont il révéla la Symphonie no 2 en 1951. La Scala[...]
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
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Médias
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