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ARLETTY LÉONIE BATHIAT dite (1898-1992)

L'âge d'or du cinéma français

Entre-temps, le cinéma a accédé au parlant. Arletty débute avec La Douceur d'aimer (R. Hervil, 1930), s'y trouve hideuse, récidive avec Un chien qui rapporte (J. Choux, 1931). En 1936, Édouard Bourdet l'associe, au théâtre, à Victor Boucher et à Michel Simon : c'est le triomphe de Fric-frac, de ses truands pour rire, de son argot à l'usage des gens du monde. En 1939, Fernandel remplace Victor Boucher pour l'adaptation cinématographique de Maurice Lehman et Claude Autant-Lara. Immuable, Arletty, superbe de malice et d'autorité, rivalise de verve avec ses partenaires. Guitry l'intègre au prologue de Faisons un rêve (1937), la noircit pour camper la reine d'Éthiopie des Perles de la couronne (1937), noue à sa taille le tablier de la soubrette de Désiré (1937). Pourchassée par la caméra, elle n'oublie pas le théâtre : L'École des veuves de Cocteau, Crions-le sur les toits de Guitry remplissent l'ABC et la Madeleine.

Elle avait rencontré Marcel Carné, alors assistant de Feyder, sur le plateau de Pension Mimosas (1934). Préparant avec Jeanson l'adaptation du roman de Dabit, Hôtel du Nord, Carné souhaite équilibrer le couple désespéré formé par Annabella et Jean-Pierre Aumont avec le duo Jouvet-Arletty, inattendu et brillantissime. « Atmosphère, atmosphère... », la réplique de Jeanson sera suivie de « pas folle la guêpe », trouvaille d'Yves Mirande pour Circonstances atténuantes (J. Boyer, 1939) où, sur un air de java, Arletty fredonne Comme de bien entendu. Elle chante encore dans Tempête (Bernard-Deschamps, 1940), mais glisse avec Le jour se lève(M. Carné, 1939) vers l'amertume et la sensibilité.

<em>Les Enfants du paradis</em>, M. Carné - crédits : Pathé/ Album/ AKG-images

Les Enfants du paradis, M. Carné

L'Occupation pèse sur Paris. La liaison d'Arletty avec un haut gradé de l'armée allemande la pousse à fréquenter la fine fleur de la collaboration, ce qui lui vaut des avanies lorsqu'elle reprend Voulez-vous jouer avec moâ de Marcel Achard. Roger Richebé, dès 1941, l'avait métamorphosée en Madame Sans-Gêne. Habillée à ravir, elle retourne aux comédies boulevardières. Cependant, Prévert et Carné ne l'oublient pas. Après qu'ils l'ont transformée en androgyne pour Les Visiteurs du soir (1942), elle devient enfin Garance, sphinx dont le sourire bouleverse la vie de quatre hommes. Garance, qui révèle une artiste dans sa plénitude et couronne sa carrière (Les Enfants du paradis, 1944). Mais elle va subir les vicissitudes de la Libération, la prison, l'éloignement de la scène et des studios. Elle accepte tout avec sérénité. Le temps de pénitence achevé, le théâtre lui permet de réaliser des créations (Un tramway nommé Désir, 1949 ; La Descente d'Orphée, 1959 ; Un otage, 1962), voire de belles reprises (Les Monstres sacrés, 1966). Mais le cinéma la néglige. Émouvante dans L'Air de Paris (M. Carné, 1954), elle est pourtant irrésistible dans Maxime (H. Verneuil, 1958). Rien de comparable toutefois avec les titres qui firent sa gloire. Peu à peu sa vue s'éteint. Sans plaintes et s'intéressant encore à toute chose, elle abandonne ce qui avait été sa vie. Sûre néanmoins, grâce au souvenir admiratif de ses fidèles, d'avoir marqué l'époque et donné sa juste valeur à l'adjectif inégalable.

— Raymond CHIRAT

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<em>Les Enfants du paradis</em>, M. Carné - crédits : Pathé/ Album/ AKG-images

Les Enfants du paradis, M. Carné

Autres références

  • LE JOUR SE LÈVE, film de Marcel Carné

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    ...». Doux et quasi féminin, puis rageur quand il est confronté au personnage ambigu de Valentin, François enrichit le film avec un rôle à contre-emploi. Arletty, sobre, trouve ici son meilleur rôle avant celui de Garance dans Les Enfants du paradis, et le moins alourdi en « pittoresque parisien ». Jacqueline...