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ROBERT LÉOPOLD (1794-1835)

<it>Le Retour de la fête de la Madone de l'Arc</it>, L. Robert - crédits : Peter Willi/  Bridgeman Images

Le Retour de la fête de la Madone de l'Arc, L. Robert

L'oubli dans lequel est tenu Léopold Robert contraste par trop avec la célébrité qui fut la sienne. Le Retour de la fête de la Madone de l'Arc, 1827, La Halte des moissonneurs dans les marais Pontins, 1830, furent sans doute — et grâce à la gravure — parmi les tableaux les plus populaires et les mieux vulgarisés du xixe siècle. Occupant dans la querelle des linéaires et des coloristes une position moyenne, tout en étant plus proche des premiers que des seconds, Robert est, avec Scheffer et Delaroche, un de ces « peintres-poètes » qui incarnent très exactement — et sans doute mieux que les artistes membres de la chapelle romantique — la sensibilité des années 1830, et son goût d'une « peinture de la pensée, du sentiment et de la nature », selon l'expression de Lamartine.

Le destin tragique de l'homme a bien sûr contribué à la renommée de l'artiste. L'amour impossible et non partagé qu'il porte à la princesse Charlotte Bonaparte, fille de Joseph et épouse de Napoléon Louis (le frère aîné, décédé en 1831, du futur Napoléon III), le conduit au suicide. Mais les circonstances du drame ne furent connues que de quelques intimes et ne firent que confirmer la célébrité d'un peintre au tempérament inquiet et mélancolique.

Sa formation d'origine est celle d'un graveur. Passé par l'atelier de David, empêché de se présenter au concours de Rome par suite du retour de la principauté de Neuchâtel à la Suisse, il s'installe à Rome en 1818 et d'emblée découvre son genre. Il peint des scènes de brigands et de paysans romains, trouvant ses modèles « dans la plus belle et la plus pittoresque population qu'il fût possible d'imaginer pour un poète et de reproduire pour un peintre » (Lamartine) et qui, en quelque sorte, concilie les exigences contraires et parallèles d'idéalisme et de réalisme dont vit le néo-classicisme. Fierté et force des sentiments, dignité et tension des êtres, pittoresque des costumes font l'originalité d'une œuvre dont on trouvera de nombreux exemples au musée de La Chaux-de-Fonds.

Dans ces grandes compositions, la scène de genre devient tableau d'histoire. La Madone de l'Arc, Salon de 1828 (Louvre), les Moissonneurs, Salon de 1831 (Louvre), comme les Vendanges et Le Carnaval de Venise qui auraient dû suivre résument à la fois les quatre saisons, les quatre régions de l'Italie, mais aussi les âges et les sentiments humains. Un dessin un peu dur, la rigidité de la composition qui traduit avec difficulté le mouvement, la description trop analytique des vêtements, une certaine grisaille générale, malgré la force des tons locaux, ne peuvent faire oublier la farouche beauté des visages, une qualité de concentration et de dignité qu'il faut placer entre Ingres et Chassériau et avant Puvis de Chavannes.

— Bruno FOUCART

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