LEPTINE
De multiples travaux tendent à relier diverses formes d'obésité chez l'homme avec des mutations génétiques. La piste la plus sérieuse est celle de la leptine. Le gène ob, qui code pour cette protéine, est exprimé seulement dans le tissu adipeux blanc. La leptine serait sécrétée par ce tissu et freinerait le comportement alimentaire par un relais hypothalamique. Son absence serait responsable des anomalies métaboliques que l'on observe chez des souris mutantes pour ce gène (obésité, hyperinsulinémie, hyperglycémie, hypothermie). Chez le rat, la production de leptine par le tissu adipeux s'effondre en quelques heures de jeûne ou au cours du diabète expérimental et revient à la normale en quelques heures aussi, après reprise de l'alimentation ou administration d'insuline. Ce type de régulation hormonale aussi strict indique clairement que la leptine agirait comme un signal de satiété.
Par ailleurs, l'administration de leptine aux souris génétiquement obèses entraîne une perte de poids très impressionnante. La leptine agit aussi sur les animaux sains qui peuvent perdre 12 p. 100 de leur poids corporel et toute leur graisse en quatre jours. Enfin, l'administration intracérébrale est plus efficace que l'administration intrapéritonéale, observation qui va à l'appui d'un site récepteur central.
Mais qu'en est-il chez l'homme ? Les résultats obtenus sont surprenants : le produit du gène ob est très augmenté chez tous les obèses. Cette augmentation est proportionnelle à la masse corporelle totale. Elle est plus marquée chez les sujets de sexe féminin, ce qui indique que la leptine est soumise à un niveau supplémentaire de régulation hormonale. De plus, aucune mutation n'est observée dans la région où réside la mutation qui rend obèse la souris. Il apparaît donc clairement que l'obésité n'est pas due à une synthèse diminuée de leptine ni à la production d'une leptine anormale. On est donc contraint d'envisager une série d'autres mécanismes pour expliquer les résultats observés. Le mécanisme le plus simple serait que l'hypothalamus ait une sensibilité diminuée aux effets de la leptine. Il en résulterait une hyperproduction, non freinée, de leptine qui serait donc inefficace chez les humains obèses Or ceux-ci sont moins sensibles à la fragilisation osseuse qui frappe les sujets ayant atteint la cinquantaine. Il a été démontré, chez des souris déficientes en leptine (ob/ob) ou en récepteurs de leptine (db/db), que la masse osseuse était accrue par rapport à celle des animaux témoins. L'ostéoporose pourrait donc être liée à une inhibition, par la leptine, de la production de substance osseuse. Cette inhibition serait, selon Gérard Karsenty (Cell., 21 janv. 2000, vol. 100, pp. 1-20), d'origine hypothalamique, comme le prouve une expérience d'injection de leptine dans le troisième ventricule cérébral chez des souris obèses, dont la masse osseuse diminue à la suite de ce traitement. Schématisée, cette information est devenue l'affirmation simpliste selon laquelle « le cerveau gouverne la masse osseuse ». L'équilibre endocrinien est trop complexe pour que cet aphorisme soit soutenable.
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Écrit par
- Jacques HANOUNE : directeur de recherche, INSERM U 99
Classification
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