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LES AVENTURES DE SIMPLICISSIMUS, H. J. C. von Grimmelshausen Fiche de lecture

Les Aventures de Simplicius Simplicissimus - crédits : AKG-images

Les Aventures de Simplicius Simplicissimus

Œuvre majeure de l'âge baroque, Les Aventures de Simplicissimus faillirent rester orphelines. Parues en 1668 sous un pseudonyme, elles ne furent l'objet d'une recherche en paternité qu'à la fin de la première moitié du xixe siècle. Par un de ces curieux hasards de l'histoire de la littérature allemande, cette redécouverte de l'identité de Grimmelshausen (1622 env.-1676) se fait l'écho de la thématique même du roman : le héros, Simplex, ne prend connaissance de sa filiation nobiliaire qu'au terme d'une série d'aventures qui ont pour cadre la guerre de Trente Ans.

Simplex dans les malheurs du temps

Contée sur le mode autobiographique à la première personne, l'histoire de Simplex s'articule en cinq livres selon le schéma de la chute et de la rédemption. Le roman s'ouvre sur le tableau idéal de l'existence du protagoniste, élevé dans une famille aux mœurs simples de paysans du Spessart. L'idylle n'est que de courte durée ; le jeune héros est chassé par la soldatesque qui pille la ferme familiale. Un ermite recueille l'enfant, l'instruit pendant deux années des rudiments de la religion chrétienne et le baptise du nom de Simplex, en accord avec l'innocence de son esprit. L'essentiel du premier livre est ainsi consacré à l'éducation d'une âme pure qui ne sait encore rien des réalités du monde troublé dans lequel elle aura à évoluer, mais qui s'en fera le miroir par sa naïveté. Avant de mourir, son maître lui laisse ces trois principes, inspirés de la doctrine de l'Église : se garder des mauvaises fréquentations, faire preuve de constance face à l'adversité et aux tentations du péché, et se repentir avec ferveur si l'on y a cédé. Abandonné dans le monde, le pieux disciple passe pour fou aux yeux de ses roués contemporains et, de cette façon, revêt les habits du bouffon au service du gouverneur protestant de la forteresse de Hanau. Symboliquement, Simplex perd son innocence dans une cérémonie où l'on essaye de lui faire croire qu'il a été transformé en veau après être descendu aux Enfers et monté aux Cieux (livre II). Il s'acquitte avec talent de son nouveau rôle et s'y entend dès lors avec perfection dans l'art de la dissimulation. Enfant chéri de la déesse Fortune, louvoyant habilement entre les différents partis qui déchirent l'Allemagne dans la guerre civile, Simplex acquiert richesse et considération, son ascension sociale allant de pair avec sa déchéance morale jusqu'à la fin du livre III. Vient la chute : Simplex s'engage dans une série d'aventures galantes qui le mènent jusqu'à Paris. Mais il en revient ruiné et perd sa beauté physique sous le coup de la variole. Le livre IV conte sa lente déchéance, qui le contraint à embrasser la carrière de bandit de grand chemin avec son comparse Olivier. Après la mort de celui-ci, il tente de revenir à son état initial de paysan, et rencontre à cette occasion son père adoptif qui lui révèle ses origines nobles (livre V). Après avoir erré de par le monde, Simplex se retire en ermite, et conclut son autobiographie par cet amer constat qui signe sa rédemption : « Adieu, monde, car on ne peut se fier à toi ni rien espérer de toi ; dans ta maison, le passé a déjà disparu, le présent disparaît sous nos mains, le futur n'a jamais commencé, le plus constant tombe, le plus fort se brise, et le plus durable prend fin ; donc que tu es un mort parmi les morts et, de cent ans, tu ne nous laisses pas vivre une heure. »

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Écrit par

  • : professeur agrégé à l'université de Poitiers

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Les Aventures de Simplicius Simplicissimus - crédits : AKG-images

Les Aventures de Simplicius Simplicissimus

Autres références

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