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LES AZTÈQUES (exposition)

À de nombreux titres, l'exposition présentée à Londres, à la Royal Academy of Arts, du 16 novembre 2002 au 11 avril 2003, constitua un événement majeur pour la perception européenne des arts précolombiens. Tout d'abord, la qualité et la diversité des œuvres exposées, 359 au total dont beaucoup pour la première fois, permettaient d'aborder la civilisation aztèque avec un regard différent. Si nombre de musées européens ou nord-américains ont prêté des pièces de haute qualité déjà connues, l'essentiel des objets exposés constituaient une véritable révélation, car ils provenaient des réserves du musée d'Anthropologie de Mexico, et des fouilles récentes du Grand Temple (Templo Mayor) de Tenochtitlán. Il faut aussi souligner la présence du « Trésor du pêcheur », ces objets en or conservés à Veracruz, qui figurent à juste titre dans la salle des trésors de l'exposition. Les recherches du Templo Mayor de Mexico ont certes fait l'objet d'expositions antérieures, ainsi Mexique d'hier et d'aujourd'hui à Paris, en 1981. Toutefois, il n'est pas possible de comparer ces deux événements, l'exposition parisienne ayant eu lieu presque au début des fouilles. Le succès de celle de Londres reflète bien l'ampleur des progrès effectués dans les recherches et l'incroyable amélioration des connaissances sur l'art aztèque. Par ailleurs, son caractère d'événement vient de ce qu'elle succèdait, à Londres, à la première exposition d'art aztèque jamais organisée, près de deux siècles plus tôt. En 1824, William Bullock ouvre en effet à l'Egyptian Hall, face à la Royal Academy, la première présentation au monde d'art préhispanique du Mexique. Certaines des pièces prêtées à cette occasion, et conservées au British Museum, figurent à nouveau ici. L'initiative de Bullock, pionnière par bien des aspects, révélait au public européen un art inconnu. L'exposition Aztecs nous donnait une vision nouvelle, inédite du sujet.

Victimes directes de la Conquête, les Aztèques étaient connus surtout par les multiples écrits des conquérants et des évangélisateurs, qui ont donné naissance à de nombreuses études, souvent de très haute qualité, comme les travaux de Jacques Soustelle. Mais la civilisation aztèque demeurait ignorée pour quantité de domaines, comme l'art ou l'architecture. La capitale, rasée, gisait sous les monuments coloniaux et la ville moderne. Ce n'est que récemment, avec les fouilles menées dans l'enceinte du Grand Temple de Tenochtitlán, que toutes les facettes de l'art aztèque ont pu reprendre vie. Bijoux, sculptures, grandes statues de céramique, masques de pierre énigmatiques démontrent la richesse de l'artisanat et l'accomplissement artistique de cette civilisation. Il en ressort une image nouvelle des Aztèques, plus humaine, libérée des préjugés qui faisaient d'eux un peuple sanguinaire, uniquement préoccupé de sacrifices et de guerres. Les Aztèques apparaissent donc proches de leurs voisins mésoaméricains, avec des préoccupations similaires. Leurs profondes conceptions religieuses, leur volonté de construire un empire, mais également leur souci de comprendre leur passé, ou de s'inscrire dans une trajectoire historique longue, les rapprochent de nous. La beauté de leurs œuvres permet de mieux comprendre l'intérêt porté à leur art par Dürer ou Cellini, qui contemplèrent les objets expédiés par Cortés en Europe, au xvie siècle.

Depuis quelques années, un changement de perspective se manifeste dans la perception des arts préhispaniques. À une vision globale de la Mésoamérique se substitue une image plus nuancée. Le monde mésoaméricain regroupe des civilisations dotées d'une base culturelle commune, mais très différentes les unes des autres. Cela découle naturellement[...]

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Écrit par

  • : docteure en archéologie à l'université Paris I-Panthéon Sorbonne, chercheuse associée Universidad de Guadalajara (Mexique)

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