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BELLINI LES

Sous le nom de Bellini, on range trois peintres vénitiens : le père et les deux fils. À ces trois peintres, on doit rattacher Andrea Mantegna qui travailla avec eux et épousa la jeune Bellini. Véritable affaire de famille, puisque sous ces liens se cachent des influences réciproques, des emprunts ou des imitations. Sur ce sol commun, trois personnalités se sont imposées : le père, Jacopo, dessinateur, héritier de la première Renaissance ; Gentile, grand décorateur, très influencé par la géométrie de l'œuvre de son père et de son beau-frère, et surtout Giovanni Bellini, qui sut profiter d'un aussi lourd héritage et poser les prémisses d'une peinture véritablement vénitienne.

Jacopo Bellini

Jacopo Bellini est né à Venise en 1400. Il se rend à Florence en 1423. Là il étudie dans l'atelier de Gentile da Fabriano, peintre dont l'œuvre marque l'apogée de la fin du style gothique dans la cité où s'élabore la première Renaissance. Vers 1430, il retourne en Italie septentrionale, non pas à Venise, mais sur la terra ferma, à Padoue, où il peint des fresques aujourd'hui perdues. Il se lie aux artistes et philosophes qui forment l'école humaniste du Nord. De retour à Venise, il vit entouré de sa famille : sa fille a épousé Andrea Mantegna, ses fils Giovanni et Gentile travaillent auprès de lui et deviennent les deux plus grands peintres de Venise. Il meurt en 1470.

Sans qu'on puisse parler d'une évolution ou d'une rupture marquées, l'œuvre de Jacopo traduit deux préoccupations distinctes : d'une part, dans les tableaux, une acceptation du style du siècle précédent ; d'autre part, dans les dessins, une volonté de participer à la recherche d'un espace pictural nouveau.

<it>La Vierge d'humilité avec Lionel d'Este</it>, J. Bellini - crédits : Peter Willi/  Bridgeman Images

La Vierge d'humilité avec Lionel d'Este, J. Bellini

Sur le peu de tableaux qu'il nous reste de Jacopo, la plupart représentent des Vierges dans la posture traditionnelle : la Vierge a la tête penchée et auréolée, elle est vêtue de tissus aux plis très marqués, elle tient entre ses bras un Christ enfant, dont la tête est disproportionnée par rapport au corps. Au fond doré ou neutre se substitue une fois (Madone et le donateur) un paysage qui crée une impression de profondeur sans appartenir au même espace que celui de la Vierge. C'est là l'aspect gothique de son œuvre.

<it>Le Christ aux Enfers</it>, J. Bellini - crédits :  Bridgeman Images

Le Christ aux Enfers, J. Bellini

Ses recherches personnelles apparaissent dans ses dessins. Il y épouse les exigences de l'humanisme. Si sa thématique reste chrétienne (Nouveau Testament), son intérêt pour l'architecture, romaine ou contemporaine, et les paysages montagneux le pousse à situer ses scènes dans un décor païen ou naturel. Aussi compose-t-il ses dessins en ayant toujours grand souci de la profondeur, élément essentiel de la perspective. Les architectures composites, souvent romaines pour le haut et vénitiennes pour le bas, sont soulignées par des lignes perpendiculaires et parallèles qui entraînent l'œil vers le point de fuite. Jacopo semble vouloir assumer tous les thèmes humanistes et multiplie les colonnades, les arcs de triomphe ; il dessine gratuitement des stèles funéraires, des monnaies impériales, et des candélabres. Mais il entend aussi intégrer à cette architecture les personnages ; il fait se dérouler les cortèges du fond vers le premier plan et non simplement de gauche à droite ; il place les foules le long des lignes parallèles des édifices.

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Écrit par

  • : maître de conférences de sociologie à l'université de Paris-VIII

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<it>La Vierge d'humilité avec Lionel d'Este</it>, J. Bellini - crédits : Peter Willi/  Bridgeman Images

La Vierge d'humilité avec Lionel d'Este, J. Bellini

<it>Le Christ aux Enfers</it>, J. Bellini - crédits :  Bridgeman Images

Le Christ aux Enfers, J. Bellini

<it>Le Sultan Mehmet II</it>, G. Bellini - crédits :  Bridgeman Images

Le Sultan Mehmet II, G. Bellini

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