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CARRACHE LES

Augustin et Ludovic

La forte personnalité d'Annibal ne doit pas faire oublier celle de ses deux aînés. Augustin, qui meurt dès 1602, a laissé une œuvre graphique abondante ; ses gravures de reproduction traduisent brillamment par le jeu des tailles les oppositions d'ombre et de lumière ; son style personnel est ironique et souvent fort libre (série des Lascivie). Son œuvre peint est assez peu nombreux, sauf au cours de la période approximative 1590-1595, dans laquelle se place la célèbre Communion de saint Jérôme (Bologne), tableau qui inspirera le Dominiquin et Rubens. Le fils naturel d'Augustin, Antoine (1589 env.-1619), fut également peintre ; mais son œuvre se réduit aujourd'hui à quelques tableaux dont l'étrange Déluge (Louvre). Quant à Ludovic, il exécute, entre 1590 et sa mort (1619), des peintures que leur intense réalisme, leurs contrastes d'ombres et de lumières apparentent parfois à celles de Caravage (Flagellation, Douai ; Martyre de sainte Ursule, 1592, Bologne). La même force et un coloris intense dont se souviendra le Guerchin se retrouvent dans les saisissantes apparitions des tableaux colossaux de 1607-1608, conservés au musée de Parme mais qui proviennent de la cathédrale de Plaisance.

<it>Mars et Vénus</it>, A. Carrache - crédits : De Agostini/ Getty Images

Mars et Vénus, A. Carrache

<it>Le Martyre de saint Pierre Thomas</it>, L. Carrache - crédits : Electa/ AKG-images

Le Martyre de saint Pierre Thomas, L. Carrache

L'œuvre des Carrache devait fortement stimuler la peinture européenne. Non seulement elle a profondément marqué leurs élèves bolonais, dont les plus grands furent le Dominiquin, Guido Reni, le Guerchin, l'Albane, mais elle a servi de modèle à tous les peintres qui s'efforcèrent de concilier l'imitation de la nature avec la recherche du beau idéal, en s'appuyant sur les grands exemples de l'art du passé. Au xviie siècle, cette attitude, qu'on a coutume d'appeler classique, fut celle de la majorité des peintres français et italiens, qui préféraient la leçon des Carrache à celle de Caravage, leur grand contemporain. Cette synthèse difficile entre le réalisme et la construction intellectuelle de la beauté devait être, pour la dernière fois dans l'art occidental, tentée et réussie par Ingres.

— Antoine SCHNAPPER

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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Médias

Homme au singe, A. Carrache - crédits : Rabatti - Domingie/ AKG-images

Homme au singe, A. Carrache

<it>Le Buveur</it>, A. Carrache - crédits : Peter Willi/  Bridgeman Images

Le Buveur, A. Carrache

<it>Le Triomphe de Bacchus</it>, A. Carrache - crédits :  Bridgeman Images

Le Triomphe de Bacchus, A. Carrache

Autres références

  • CARAVAGE (vers 1571-1610)

    • Écrit par et
    • 4 798 mots
    • 7 médias
    ...créateur de formes simples » (Longhi). Bellori critiquait le second tableau pour son manque total d'action. Comprenons qu'il le faisait pour mieux louer Carrache ; dans la représentation d'une histoire, Carrache accepte le développement naturel des faits en insistant sur les causes et les conséquences ;...
  • CARICATURE

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    • 8 333 mots
    • 8 médias
    Les Carrache comparèrent les différents états du graphisme en lui faisant parcourir les degrés qui vont de la description à la suggestion, de l'imitation à l'équivalence : « L'invention du portrait caricatural présuppose la découverte théorique de la différence entre ressemblance et équivalence », note...
  • DÉCORS D'ANNIBAL CARRACHE, PALAIS FARNÈSE (Rome)

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    • 211 mots
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    Lorsqu'il est appelé à Rome, en 1595, Annibal Carrache est déjà un peintre célèbre. À Bologne, avec son frère Augustin et son cousin Ludovic, ils ont fondé en 1585 l'Accademia degl'incamminati, une académie appelée à servir de modèle, réalisé de nombreux tableaux d'autel, décoré le palais...

  • INCAMMINATI ACADÉMIE DES

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    Le développement des académies en Italie dans la seconde moitié du xvie siècle répond au besoin de donner un encadrement, une valeur théorique, aux tendances multiples et contradictoires issues du maniérisme. L'Accademia fiorentina, établie par Cosme Ier dès 1540, se préoccupait de...