COYPEL LES
La dynastie des Coypel est peut-être la plus importante de toutes celles que l'on trouve dans l'histoire de l'art français aux xviie et xviiie siècles : quatre peintres célèbres, parmi lesquels un directeur de l'Académie de France à Rome (Noël Coypel, 1628-1707) et deux premiers peintres (Antoine Coypel, 1661-1722 et Charles Coypel, 1694-1752). On dit trop souvent que ces artistes ont précisément dû leurs succès officiels à cette position familiale, en méconnaissant leurs mérites.
Les grandes œuvres d'Antoine Coypel représentent en France l'équivalent des plafonds romains de Baciccia. Le décor de la galerie d'Énée, peint pour le futur régent à partir de 1702, se trouve aujourd'hui détruit ; des fragments en subsistent (musées d'Arras et de Montpellier) et cette décoration a pu être reconstituée grâce aux gravures. Le plan de la galerie ne permettait pas d'unifier les représentations : Antoine Coypel prit donc le parti de traiter les murs et la voûte en panneaux séparés, mais il ordonnait les différents tableaux autour d'un grand motif central, où apparaissait toute une assemblée céleste, sur le thème de Vénus suppliant Jupiter (l'esquisse subsiste au musée d'Angers). À la chapelle de Versailles (1708), un pas supplémentaire est franchi : toute la voûte de la nef est couverte par une seule scène, qui se déploie en faisant en quelque sorte éclater la division architecturale des doubleaux ; comme au plafond du Gesù, le ciel fait irruption dans l'espace de l'église, au moyen d'une immense percée illusionniste.
Nicolas Coypel (1690-1734), frère cadet d'Antoine, ne semble pas avoir beaucoup bénéficié des avantages que cette parenté aurait pu lui valoir ; alors que son neveu Charles, le fils d'Antoine, était choyé et couvert d'honneurs dès le jeune âge, Nicolas ne dut ses succès qu'à ses propres efforts. Sa disparition prématurée l'empêcha de donner toute la mesure d'un talent qui se rapproche de celui de François Lemoyne et annonce Boucher, comme en témoignent des tableaux tels que le Jugement de Pâris (1738, musée de Stockholm) ou le Bain de Diane de l'Ermitage. Comparé à celui de son oncle, le talent de Charles Coypel donne l'impression de manquer de vigueur et d'originalité ; il perpétue un style hérité de son père, avec comme lui un coloris qui emprunte à la fois à Rubens et à Véronèse (Les Pèlerins d'Emmaüs, 1746, Saint-Merry, Paris). Homme cultivé, qui se piquait volontiers de littérature, Charles Coypel reste un peintre de second rang.
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Écrit par
- Georges BRUNEL : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres, conservateur des objets d'art des églises de la Ville de Paris
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