FRANCKEN LES
Importante dynastie de peintres anversois des xvie et xviie siècles.
Frans I (1542-1616) et Ambrosius I le Vieux (1544-1618) appartiennent à l'école de Frans Floris et représentent à Anvers à la fin du xvie siècle le même courant conservateur et académique de grande peinture religieuse que Frans Pourbus I et Otto Van Veen (Venius), mais avec plus de raideur grinçante et moins de convenance formelle.
Ambrosius devint franc-maître à Anvers en 1573 et fut influencé par Maarten De Vos ; c'est peut-être, dans ce groupe, la plus forte personnalité par son sens des éclairages impressionnants et son jeu de couleurs froides, aigres et criantes (tons bleus, jaunes, lie de vin dans le goût des maniéristes), tandis que ses grandes figures ont encore une grâce et une sveltesse maniéristes et s'imposent par une mise en scène monumentale. On peut l'étudier commodément au musée d'Anvers, qui rassemble nombre de ses retables d'autel, peints sur bois et toujours de grandes dimensions où se détachent particulièrement La Multiplication des pains (1598), La Cène (signée AF), le Martyre de saint Georges.
Frans I, lui aussi formé dans l'atelier de Floris, devint franc-maître à Anvers en 1567 (ou en 1569). On le confond souvent avec son fils Frans II (et au détriment de ce dernier). En dehors de grandes peintures religieuses, souvent difficiles à séparer de celles de ses autres frères (ainsi un Jésus parmi les docteurs, de 1587, à la cathédrale d'Anvers), Frans I a laissé quelques rares tableaux de cabinet (par exemple, un Portement de croix de 1597, jadis à Dresde) qui annoncent par le goût des petites figures agiles la manière minutieuse de son fils Frans Francken II. De son atelier proviennent aussi des Montée au calvaire (Glasgow, Baltimore) et des Festin de Balthazar (Poitiers, Rouen, Besançon) grouillant de personnages, avec des éclairages contrastés d'esprit maniériste, une fantaisie décorative et chatoyante qui caractériseront encore mieux l'art infiniment plus raffiné et plus perfectionniste du fils.
Hieronymus I le Vieux (1540-1610) suivit une carrière moins anversoise : s'il passa comme les autres frères Francken par l'atelier de Floris, il était à Paris dès 1565 et fit un séjour important à Fontainebleau en 1566 comme le rapporte Van Mander dans la Vie de Ketel (Hieronymus Francken travaillait là avec Ketel, Apert Franssen, Denis d'Utrecht et Hans de Moeyer, et cette influence de Fontainebleau sur les jeunes peintres nordiques de l'époque est bien significative de l'importance et du renom de ce foyer d'art maniériste à l'accueil duquel, certes, étaient déjà tout préparés les élèves de Floris). Encore à Fontainebleau en 1570, à Anvers en 1571, il revient vite à Paris, où il se marie en 1578 et exécute en 1583 une Adoration des bergers, aujourd'hui conservée à Notre-Dame de Paris. Ensuite, il semble avoir fait de nombreux voyages entre Anvers et Paris, devenant même peintre du roi. Plus que ses œuvres religieuses, d'un style académique qui est habituellement celui des Francken, plus que son activité de portraitiste très vantée à l'époque, notamment en France, mais pratiquement disparue sans traces (à l'exception du rarissime Autoportrait du musée d'Aix-en-Provence), c'est surtout comme peintre de bals et de marascades qu'il retient l'attention (Carnaval vénitien, signé et daté de 1565 au musée d'Aix-la-Chapelle, des Bal à Vienne et au musée Mayer Van den Berghe à Anvers).
De telles œuvres, sans doute marquées par le vénétianisme du Flamand Toeput (dit Pozzoserrato) et joliment peintes dans une technique raffinée et plaisante, sont capitales, car elles ouvrent la voie aux alertes et élégantes « sociétés » de Frans et Hieronymus II le Jeune, ainsi qu'à bien d'autres spécialistes flamands comme Van der Lamen, Jérôme[...]
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Écrit par
- Jacques FOUCART : conservateur des Musées nationaux, service d'études et de documentation, département des Peintures, musée du Louvre
Classification
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