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NEUF CHAPITRES SUR LES PROCÉDURES MATHÉMATIQUES LES

Les trois textes mathématiques chinois les plus anciens dont nous ayons connaissance sont le Livre de procédures mathématiques (Suanshushu), le Classique mathématique du Gnomon des Zhou (Zhoubi suanjing) et les Neuf Chapitres sur les procédures mathématiques (Jiuzhang suanshu). Le premier, objet d'une découverte archéologique en 1984, est antérieur à 186 avant J.-C. Le deuxième, astro-mathématique, a été probablement composé au début de l'ère chrétienne. Quant aux Neuf Chapitres sur les procédures mathématiques, l'opinion la plus générale considère qu'il a été composé ou compilé entre 206 avant J.-C. et 9 après J.-C. Ses premiers auteurs pourraient en être Zhang Cang et Geng Shouchang. Nous ne possédons pas les originaux de ces deux textes, mais seulement les produits de leur transmission à travers les siècles sous des formes peut-être remaniées ou détériorées par rapport aux ouvrages initiaux. Les supposés compilateurs des Neuf Chapitres sur les procédures mathématiques auraient recueilli des textes divers antérieurs au iie siècle avant J.-C. et d'autres plus contemporains, en unifiant le style et en structurant le tout en un ensemble ordonné. Ce que nous possédons du texte est complété par des commentaires dus à des auteurs plus tardifs, dont les principaux furent Liu Hui (220 env.-env. 280) et Li Chunfeng (602-670). La tradition chinoise a consacré la réunion du supposé original et de ces commentaires fondamentaux en hissant l'ensemble au statut de classique et en en faisant le texte fondateur des mathématiques chinoises, au point que c'est de cet ensemble qu'il est question lorsqu'on parle des Neuf Chapitres sur les procédures mathématiques ou, plus brièvement, des « Neuf Chapitres ».

Organisation de l'ouvrage

Le texte est composé de neuf chapitres contenant en tout l'exposé de 246 problèmes. Ces problèmes comportent leur énoncé et la réponse numérique aux questions posées. Il n'y a aucune définition ni démonstration ou justification. En revanche, pour un problème ou une série de problèmes est, en général, adjointe une procédure algorithmique qui donne la marche à suivre pour effectuer les calculs permettant d'atteindre la solution proposée. Le rôle de ces procédures est fondamental, en ce sens qu'un certain nombre d'entre elles traversent tout l'ouvrage en se répondant les unes aux autres, lui donnant ainsi sa vraie architecture. Les chapitres regroupent des problèmes de même type. Ceux-ci sont toujours d'aspects concrets et parfois peuvent sembler naïfs. En réalité, ils renvoient à des traitements qui peuvent être très sophistiqués.

Une des raisons de la célébrité de cet ouvrage fondateur est, paradoxalement, qu'il s'est vite avéré difficile à comprendre. Aussi de nombreux commentaires ont-ils été nécessaires qui ont fourni l'occasion d'un travail authentiquement mathématique. Le premier commentateur surtout, mais aussi ses successeurs, ont tenté à la fois de rectifier des erreurs et de justifier les procédures proposées. Il s'agit probablement, d'une part, d'une volonté de restitution et, d'autre part, d'une volonté d'extension et de généralisation des notions contenues. Un des objets de la traduction en français et de l'édition annotée parue en 2004 est de montrer la cohérence mathématique du texte et de suggérer qu'au-delà de son aspect très algorithmique et non axiomatique on aurait affaire, essentiellement dans le travail de Liu Hui, à une exigence de sécurité dans l'utilisation des procédures ainsi qu'à une recherche de générations de nouvelles procédures à partir de celles déjà existantes. Alors on pourrait parler de la présence de démonstrations d'une nature toute différente de ce que la tradition gréco-occidentale a pu produire.[...]

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Écrit par

  • : professeur certifié de mathématiques, chercheur en histoire des sciences chinoises

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