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LES ORIGINES DU MONDE. L'INVENTION DE LA NATURE AU XIXe siècle

L’animal en l’homme

Un des signes de la force de ces interrogations est que, même à la fin de ce siècle passionnant, elles n’épuisent pas ce mystère des origines. Chez Filippo Palizzi, dans Après le déluge (1864, Naples, museo di Capodimonte), le paysage est toujours celui d’un gigantesque chaos, mais les animaux cheminent dans une coexistence chaleureuse. L’Arche est sur une éminence, et sa position dominante, comme le feu que les hommes maîtrisent, et le ciel radieux où brille l’arc-en-ciel sont le signe d’un immense espoir et d’une réconciliation entre l’homme et les espèces vivantes. Briton Rivière, dans Au-delà de l’homme (vers 1894, Londres, Tate Gallery), situe dans un univers de roc et de glace aux formes déchiquetées un ours polaire fixant le soleil levant rougeoyant, et dont on ne sait s’il apprécie simplement l’aube du jour, ou s’il pressent qu’il ne vit qu’une des étapes de l’histoire des êtres. Dans le Combat de centaures, d’Arnold Böcklin (1872, Bâle, Kunstmuseum), l’art renouvelle l’interrogation portée jusque-là par la mythologie antique : il ne s’agit plus de croire ou de ne pas croire à l’existence passée d’êtres à corps de cheval et torse humain, mais de sonder nos peurs devant ce qu’est une hybridation. Jusqu’où l’homme a-t-il une part d’animal, et laquelle ? Quelle est la forme de cet héritage de millions d’années d’évolution que nous ne pouvons pas effacer ? Chez Paul Gauguin, dans le bas-relief en bois polychrome Soyez mystérieuses (1890, Paris, musée d’Orsay), cette question des origines est merveilleusement éprouvée et exprimée par la femme – l’être qui reçoit le germe et qui fait naître –, en lien avec l’eau, le végétal, et l’accord entre les autres âges et les autres mondes. La Polynésie est l’image et le lieu d’un Paradis que l’Occident a perdu, mais qu’il ne peut se résoudre à oublier.

Devant les questions de notre temps que posent la disparition de nombreuses espèces, les modifications de la nature et la présence des pandémies, cette exposition brasse des œuvres, des faits et des analyses essentiels pour les débats les plus brûlants.

— Christian HECK

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Écrit par

  • : professeur émérite d’histoire de l’art à l’université de Lille

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Média

<em>Girafe nubienne</em>, J.-L. Agasse - crédits : VCG Wilson/ Corbis/ Getty Images

Girafe nubienne, J.-L. Agasse