LES ORIGINES DU TOTALITARISME, Hannah Arendt Fiche de lecture
De l’antisémitisme à la « fin des droits de l’homme »
Arendt propose une lecture originale de l’antisémitisme qui apparaît au xixe siècle en Europe et se distingue tant de « l’antique haine des Juifs d’origine religieuse » que des idéologies nationalistes. Sur le plan social, l’antisémitisme expose les Juifs à une alternative tragique symbolisée par deux archétypes (le « paria » et le « parvenu »). Sur le plan politique, il a partie liée avec l’émergence puis le déclin de l’État-nation. Arendt met notamment au jour une alliance implicite nouée entre les États-nations européens et les élites financières juives, ces dernières étant disposées – contrairement à la classe bourgeoise – à financer le déploiement des premiers. Durant le dernier tiers du xixe siècle, tant l’antisémitisme que l’affaissement de la forme stato-nationale sont exacerbés par l’essor de l’impérialisme et de sa démesure principielle visant à « l’expansion pour l’expansion », entreprise à laquelle participe désormais une bourgeoisie en quête de profits et de pouvoir.
La colonisation européenne permet par ailleurs aux théories racistes reposant sur de prétendus fondements biologiques de prospérer et donne naissance à des expérimentations bureaucratiques qui préfigurent les « massacres administratifs » pratiqués à grande échelle par les régimes totalitaires. La voie vers le totalitarisme est également préparée par la faillite des droits de l’homme dans leur conception traditionnelle, qui se révèle lorsque des millions de réfugiés et apatrides perdent, durant l’entre-deux-guerres, leurs droits fondamentaux en même temps que la protection que leur offrait leur nationalité.
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Écrit par
- Vincent LEFEBVE : docteur en sciences juridiques, chercheur au Centre de recherche et d'information socio-politiques, Bruxelles, collaborateur scientifique au Centre de droit public et social de l'université libre de Bruxelles (Belgique)
Classification
Média
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