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LES PAPILLONS DU BAGNE (J. Rolin) Fiche de lecture

Jean Rolin - crédits : Eric Fougere/ VIP Images/ Corbis/ Corbis Entertainment/ Getty Images

Jean Rolin

Les Papillons du bagne est un ouvrage de l’écrivain Jean Rolin, publié en 2024. Un autre récit du même auteur, paru en 1999, s’intitule Traverses et pourrait bien constituer le titre générique d’une œuvre qui emprunte les chemins les plus divers, fréquente des marges urbaines négligées (La Clôture, 2002) et avance rarement selon une ligne droite.

Le lecteur de Jean Rolin doit donc s’apprêter une nouvelle fois à flâner, à s’égarer, et à s’en réjouir. Les Papillons du bagne(édité chez P.O.L) nous conduit d’abord vers une Côte d’Azur hors saison, avant que le narrateur, peu inspiré par ce voyage, ne bifurque vers la Guyane, en quête du papillon morpho qui fait la réputation du lieu.

Un roman familial inachevé

Au commencement, donc, Jean Rolin retrouve dans sa bibliothèque un exemplaire dépareillé du Journal de Katherine Mansfield (1888-1923). L’ouvrage a appartenu à sa mère. Il a une valeur sentimentale et rappelle une aventure amoureuse précédant la naissance de l’écrivain. Pour en savoir plus sur cette brève romance, celui-ci prend le train entre Menton, où a habité la nouvelliste néo-zélandaise, et Toulon. Les routes sur lesquelles il marche ensuite entre deux étapes sont souvent sans grâce. On reconnaît dans ce voyage du piéton le Rolin du Pont de Bezons (2020) et de La Traversée de Bondoufle (2022). L’exploration des lieux met en valeur le quotidien à la fois le plus ordinaire et le plus significatif. Elle contient sa part autobiographique : la dimension sociale et celle plus personnelle s’accordent.

Mais une enquête élargie, consacrée aux écrivains ayant vécu sur cette Côte d’Azur si fameuse, n’inspire guère le narrateur. C’est tout juste si Hyères, où Godard a filmé Jean-Paul Belmondo et Anna Karina dans Pierrot le fou, lui parle. Aucune trace du tournage ne subsiste. Au premier quart du récit, assez désorienté, il renonce à son projet. Il trouvera son sujet dans sa chambre d’hôtel en visionnant Papillon(1973), un film qui connut un succès considérable. L’adaptation de l’autobiographie très romancée d’Henri Charrière, forçat au bagne de Cayenne dans les années 1920, réveille son désir de retourner en Guyane. En 1980, il a déjà voyagé dans la région, descendu le cours du Jari, affluent de l’Amazone. Il a vu des morphos et rencontré Daniel Keith Ludwig, richissime américain qui avait acheté aux militaires brésiliens au pouvoir un territoire vaste comme la Belgique.

Chez Charrière, la vérité des faits est plutôt chahutée, mais Rolin, en le lisant, apprend au moins que les détenus traquaient les fameux papillons pour le compte de collectionneurs plus ou moins honnêtes et de spécialistes parfois indiscutables. On a bâti de petites fortunes sur ces lépidoptères comme sur d’autres insectes et animaux dont il est question dans le récit.

Le film interprété par Dustin Hoffman et Steve McQueen n’est pas la seule source de l’écrivain. Il a lu les mémoires de l’entomologiste Eugène Le Moult (1882-1965). Si Charrière a tendance à affabuler, Le Moult n’est pas en reste et l’on s’amusera beaucoup à découvrir certaines de ses inventions ou exagérations. D’autres livres plus sérieux serviront de point d’appui à cette quête, y compris les romans de Vladimir Nabokov dont l’activité scientifique, reconnue par certains lépidoptéristes, est presque aussi importante que l’œuvre qui l’a rendu célèbre. L’auteur de Pnine et d’Autres rivages est à de nombreux égards une référence pour notre écrivain.

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Jean Rolin - crédits : Eric Fougere/ VIP Images/ Corbis/ Corbis Entertainment/ Getty Images

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