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LES PHILOSOPHES HELLÉNISTIQUES (A. Long et D. Sedley) Fiche de lecture

Par analogie avec la période historique qui commence à la mort d'Alexandre en 323 avant J.-C., on appelle philosophies « hellénistiques » le scepticisme, l'épicurisme et le stoïcisme, apparus à Athènes une génération après Aristote, ou une ou deux générations après sa mort. Or, à quelques rares exceptions près, comme trois lettres d'Épicure ou l'Hymne à Zeus du stoïcien Cléanthe, rien n'a été conservé de ces philosophies, soit que certains de ces penseurs n'aient rien écrit (Pyrrhon, Arcésilas), soit que les œuvres aient été perdues. Pour y accéder, il n'y a que deux possibilités. La première consiste à lire les œuvres des adeptes de ces philosophies, postérieures de deux à quatre siècles (le sceptique Sextus Empiricus, l'épicurien Lucrèce ou les stoïciens Sénèque, Épictète et Marc Aurèle), avec toutes les déformations que l'on imagine aisément. La seconde consiste à traquer dans la vaste littérature de l'Antiquité des résumés, des témoignages et de brèves citations, tous souvent plus ou moins déformés, surtout quand les propos sont rapportés par des adversaires. Cette seconde possibilité a longtemps été réservée à des spécialistes de la philosophie antique, qui s'aidaient, pour un patient travail de détective, de recueils de fragments publiés sans traduction ni commentaire, comme les Stoicorumveterum fragmenta, publiés au début du xxe siècle par l'érudit allemand Hans von Arnim.

La situation a changé depuis la publication en 1987 de la magistrale somme d'Anthony Long et David Sedley, Les Philosophes hellénistiques, traduite en français par J. Brunschwig et P. Pellegrin (GF-Flammarion, 2001). Il s'agit d'une anthologie en trois volumes, qui contient une part très importante des principaux témoignages et fragments des stoïciens et des épicuriens, ainsi que ceux des courants sceptiques (Pyrrhon, les Académiciens et le néo-pyrrhonisme). Ces textes sont présentés par école, classés par thèmes, et accompagnés de notes et de commentaires, qui rendent accessible la substance du travail des spécialistes. Seuls n'ont pas été reproduits dans l'édition française les textes grecs et latins, ainsi que certaines notes philologiques. Mais ils restent toujours disponibles de façon indépendante dans le volume 2 de l'édition originale (Cambridge University Press). Pour ceux qui veulent poursuivre leur recherche, le volume 3 comprend une vaste bibliographie de 655 titres, enrichie par les traducteurs français de plus de 400 titres supplémentaires.

L'ouvrage est le panorama le plus complet et le plus synthétique qui existe de l'ensemble des philosophies hellénistiques. Mais c'est aussi une véritable œuvre de chercheurs, qui propose des interprétations novatrices, des textes qui n'étaient guère connus, même des spécialistes, ou encore qui n'avaient pas été édités de façon satisfaisante. Pour ces raisons, mais aussi pour le caractère magistral de ses commentaires, à la fois philosophiquement exigeants et d'une grande clarté pédagogique, l'édition originale de l'ouvrage est un classique chez les spécialistes de philosophie antique du monde entier, et même en dehors de ce cercle restreint pour tous ceux qui, dans le monde anglo-saxon, s'intéressent à la philosophie. Il en va de même pour la France, où il a d'ailleurs été accueilli dans une collection qui a fait une large place aux classiques de la philosophie antique. La traduction a été réalisée en étroite collaboration avec les auteurs, qui ont discuté avec J. Brunschwig et P. Pellegrin de nombreuses suggestions proposées par ceux-ci.

Le danger d'une anthologie, c'est qu'elle conduise ses lecteurs à se contenter des textes cités sans plus chercher au-delà, en oubliant qu'une anthologie et une interprétation n'ont pas[...]

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