LES PLEURS, Marceline Desbordes-Valmore Fiche de lecture
Le don des larmes
Par sa dimension cathartique, la poésie permet à l'exilée, l'orpheline, l'amante abandonnée, l'amie ou la mère lourdement endeuillée de sublimer les drames de la vie. Au-delà de la mélancolie, Marceline Desbordes-Valmore glane une joie légère dans la mémoire de « l'éphémère éternel » dont le roseau, l'alouette ou le papillon sont quelques-uns des symboles. Des « pleurs » et des amants aux « fleurs » et aux enfants, le recueil illustre le passage de la passion amoureuse et personnelle au détachement de l'amour altruiste et universel.
Tragique et lyrique, élégiaque et pathétique, l'écriture des Pleurs est musicale et fluide, intime et grave. La prosodie souple et inventive joue sur l'agencement subtil des rimes et des sons. Les longs poèmes et les chansons aux refrains nostalgiques mêlent la solennité ondulante de l'alexandrin et du décasyllabe au souffle naturel et plus bref de l'octosyllabe ou de l'impair pentasyllabe dont La Bonne Chanson de Verlaine se souviendra.
Plus ou moins bien reçu à sa parution, parfois condamné pour ses références chrétiennes, Les Pleurs explore le désir et l'inconscient d'une femme où « l'espoir filtre toujours/ Au fond de ta joie écoulée » (« Le Rossignol aveugle », XXXVI). Alliant l'inquiétude et la révolte existentielles à la méditation religieuse et à l'éthique, Marceline Desbordes-Valmore est la « poète maudit[e] » et romantique de la perte et de la rédemption mémorielle. Devant la mort, l'amour perdu et l'exil, Les Pleurs célèbre la beauté du précaire, la fragilité des plus petits et fonde, dans la douleur et la douceur partagées, une fraternité humaine.
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Écrit par
- Yves LECLAIR : professeur agrégé, docteur en littérature française, écrivain
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