LES PRÉCIEUSES RIDICULES, Molière Fiche de lecture

Molière et les médias

Premier texte imprimé de Molière, Les Précieuses ridicules inaugure le rapport mouvementé que l’homme de théâtre entretiendra avec les éditeurs et les médias tout au long de sa carrière. Dans les semaines qui suivent la création de la pièce, le libraire Jean Ribou (1630-1702) en obtient subrepticement le privilège, c’est-à-dire le droit exclusif de la faire imprimer et de la vendre. Une plainte de Molière et de quelques grands éditeurs parisiens leur permet de récupérer le privilège et d’éditer la pièce avec une préface de l’auteur. Bien décidé à profiter tout de même du phénomène, Ribou s’associe alors à un certain Somaize pour décliner le titre, en 1660-1661, en une gamme de produits dérivés, des Véritables Précieuses au Grand Dictionnaire des Précieuses, en passant par un Procès des Précieuses. Il n’est pas le seul : Marie-Catherine Desjardins fait paraître également son Récit en prose et en vers de la farce des Précieuses (1660).

Si ces publications entretiennent l’intérêt pour la comédie, elles font surtout la célébrité du dramaturge. Les Précieuses ridicules marquent ainsi la naissance de la « vedette » Molière. De 1659 à 1661, préfaces, épîtres, gazettes et pièces de théâtre concurrentes louent ou attaquent le comédien-auteur, tantôt sous le nom de Molière, tantôt sous celui de Mascarille. Loin d’être victime, l’homme de scène nourrit ce processus, bien conscient du pouvoir de la publicité et de son importance cruciale pour sa troupe et sa carrière. Cette communication virtuose explique le succès que connaît Molière à son époque et la place qu’il occupe encore, près de cinq siècles plus tard, dans le canon littéraire.