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LES SOLITUDES, Luis de Góngora Fiche de lecture

Le « gongorisme »

La langue somptueuse et raffinée des Solitudes accumule, de façon éblouissante, souvent hermétique, toujours élégante, les caractères du baroque littéraire : cultismes, latinismes, hellénismes, métaphores audacieuses, conceptisme, périphrases brillantes, figures de style, notamment l'hyperbate (inversion de l'ordre naturel des mots), la paronomase (rapprochement de mots presque homonymes), l'énumération. Tous les sens sont sollicités par cette orchestration verbale, dont Góngora joue en virtuose. Musicalité, lumières, couleurs, formes voluptueuses, rythmes et images : tout concourt au charme insolite et puissant de ces grandes compositions d'ambiance pastorale et mythologique.

Les admirateurs de La Fable de Polyphème et Galathée, composée en 1612, furent de nouveau séduits par la langue de Góngora. D'autres, tels Lope de Vega (1562-1635) ou, plus tard, Quevedo (1580-1645), s'indignèrent. Dès lors, polémiques et commentaires n'ont plus cessé de se multiplier. Aux critiques, Góngora répondit avec mépris : « C'est pour moi un honneur de passer pour obscur aux yeux des ignorants, ce qui est pour les doctes une marque de distinction. » La postérité lui a donné raison. Les poètes de la Génération de 1927, et notamment les magistrales études de Dámaso Alonso, ont contribué à faire reconnaître le génie exceptionnel de cet inventeur d'un langage nouveau. La critique récente, à la suite de Robert Jammes, plus que « la fuite de la réalité » qu'illustreraient les Solitudes, y révèle « le désir d'appréhender et de dire l'intime beauté des êtres et des choses [...], comme à la recherche de leur essence ».

— Bernard SESÉ

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española

Classification

Autres références

  • GÓNGORA Y ARGOTE LUIS DE (1561-1627)

    • Écrit par
    • 2 217 mots
    Si éblouissant qu'apparaisse le Polyphème, il semble avoir été d'abord pour Góngora une « ouverture » aux thèmes et aux variations des Solitudes. Comme on l'a vu, Góngora, après avoir composé la première Solitude, longue de 1 091 vers, ne mena pas jusqu'à son terme la seconde,...