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LES YEUX D'ELSA, Louis Aragon Fiche de lecture

À la suite du Crève-Cœur (avril 1941), qui avait marqué son retour à la poésie après dix ans d'interruption, Louis Aragon (1897-1982) publie en mars 1942 aux Cahiers du Rhône, à Neufchâtel, Les Yeux d'Elsa. Ce recueil, qui rassemble des poèmes parus en revues entre juin 1941 et février 1942, inaugure le long cycle consacré par l'auteur à sa compagne Elsa Triolet, avec qui il formera jusqu'à la mort de celle-ci, en 1970, un couple mythique. Suivront, entre autres, Le Roman inachevé (1956), Elsa (1959), Le Fou d'Elsa (1963), Il ne m'est Paris que d'Elsa (1964).

L'Amour la Poésie la France

Si c'est bien comme recueil de poèmes que Les Yeux d'Elsa sont passés à la postérité, près de la moitié du livre relève de l'essai : une préface, intitulée Arma virumquecano (« je chante les armes et l'homme », premiers mots de l'Énéide de Virgile), datée de février 1942, et trois articles en appendice (La Leçon de Ribérac, ou l'Europe française, La Rime en 40, et Sur une définition de la poésie, textes parus dans diverses revues) constituent un véritable art poétique, et viennent éclairer l'objectif esthétique poursuivi par Aragon dans les vingt et un poèmes qu'ils encadrent. Ceux-ci se succèdent « dans l'ordre suivant lequel ils ont été écrits ».

Toutefois, à cet ordre chronologique, se superpose une organisation plus significative, en quatre grandes sections : après un poème liminaire, Les Yeux d'Elsa, qui donne son titre au recueil, Les Nuits (allusion à Musset) regroupent quatre pièces évoquant la guerre et ses conséquences. Les cinq poèmes suivants forment un ensemble autour du thème du « monde à l'envers » (« Diable de temps ceux qu'on disait amis/ Sont ennemis avant qu'on soit remis/ Le noir est blanc le défendu permis/ Le meilleur est le pire »), cette fois sous le patronage de Verlaine (« Les Fêtes galantes ») ; la troisième série, Les Plaintes, ressuscite ce genre oublié ; la quatrième a pour unité la référence au monde médiéval (« Richard Cœur-de-Lion », « Lancelot »...), et plus précisément l'amour courtois. Enfin, Cantique à Elsa conclut le recueil en répondant au poème d'ouverture.

On voit ainsi se dessiner, si l'on ajoute les trois textes en appendice, un itinéraire qui mène de la guerre à l'amour et de l'amour à la création. La composition de l'ouvrage n'est toutefois pas aussi rigide. Les transitions sont nombreuses qui ménagent le passage insensible d'un bloc à l'autre, de sorte qu'entre les trois figures de la France, de la Femme, et de la Poésie qui obsèdent le recueil, l'entrelacement est complet et permanent.

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