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LIBÉRALISME

La démocratie libérale

Fruit d'une évolution historique bien plus que schéma de société conçu par l'esprit, la démocratie libérale, en son sens premier, est la conjonction du libéralisme politique et du libéralisme économique.

Le double principe de la démocratie libérale

Son « principe », pour s'exprimer comme Montesquieu, ou bien, si l'on préfère, son principe d'intelligibilité, est double. Il réside dans la dissociation de la politique et de l'économie et dans l'indissociabilité simultanée du libéralisme politique et du libéralisme économique. Celle-ci commande implicitement toute l'œuvre doctrinale de Sismondi ; celle-là fut explicitement proclamée, en France, dès les premières années de la Révolution en 1789.

Dissociation, d'abord, de la politique et de l'économie. En son sens exact, l'économie englobe la totalité des activités relatives à la production, à la distribution et à la consommation des richesses. Ainsi entendue, l'économie constitue bien « le fond des choses » : pas de vie humaine sans la satisfaction, dans de bonnes ou de mauvaises conditions, des besoins de tous en biens et en services ; pas de vie sociale possible s'il n'y a pas production et consommation des biens et des services tenus pour indispensables. La politique, en son sens étymologique, c'est l'organisation de la Cité, ce sont les choix fondamentaux qui déterminent les modalités de l'organisation de la société. De façon plus précise, la politique, c'est la détermination de la forme de l'État, l'organisation des différents pouvoirs publics et la mise en œuvre de leurs compétences respectives. En son sens le plus usuel, celui qui correspond à l'expression « faire de la politique », le mot désigne tout ce qui concerne l'accès aux fonctions dont la compétence est délimitée par les différents pouvoirs publics. Au sens large ou au sens étroit du terme, la politique désigne toujours l'effort des hommes en vue d'assurer la maîtrise de leur destin, leur volonté de ne pas subir sans réagir la force des choses et de déterminer eux-mêmes les traits de la société où ils vivent. Comment, du même coup, l'un des objets essentiels de la politique ne serait-il pas l'action sur l'économie ? En d'autres termes, ceux de Bénoit, « si l'économie constitue le fond des choses, l'objet de la politique est d'acquérir la maîtrise des choses ».

Formule qui éclaire doublement le principe libéral de la dissociation de la politique et de l'économie. Elle affirme, en premier lieu, la prééminence de la politique sur l'économie. Alors que la thèse marxiste du matérialisme historique affirme la primauté de l'économie, l'organisation politique n'étant guère qu'une superstructure en dernière analyse commandée par elle, le libéralisme déduit la prééminence de la politique des enseignements de l'histoire : « C'est la politique qui tend toujours à gouverner l'économie. » Elle indique, en second lieu, que le libéralisme économique commande à l'État de « refuser de considérer l'économie comme entrant globalement dans le cercle des attributions propres de la puissance publique, État ou collectivités décentralisées, pour la laisser, en règle générale, aux particuliers ». Il reste que la dissociation est simplement institutionnelle : la décision de confier l'activité économique à l'initiative et à l'action privées implique, bien loin de l'exclure, « la maîtrise de l'économie par l'État libéral ». Moraliste et économiste, Sismondi l'enseigne : le bien-être de toutes les classes sociales, le bonheur pour tous doit constituer l'horizon de toute politique. En ce sens au moins, l'économie ne doit jamais cesser d'être subordonnée à la recherche de la liberté de la personne humaine.[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-II-Panthéon-Assas

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Média

John Stuart Mill - crédits : London Stereoscopic Company/ Hulton Archive/ Getty Images

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