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LIBERTÉS URBAINES

Ensemble de franchises et de droits civils et politiques obtenus par les villes d'Occident à partir de la renaissance des fonctions économiques urbaines vers le xe siècle. C'est au xiie siècle que, de plus en plus peuplées et riches, les villes s'organisent, traitent avec leur seigneur — le comte, l'évêque, le roi — et jouent souvent de la rivalité de ceux qui exercent le pouvoir politique (le roi contre le comte, le comte contre l'évêque, etc.) pour obtenir la reconnaissance d'une personnalité collective. Cette reconnaissance s'exprime par une charte, qui énumère les libertés concédées et permet, en certains cas, la création d'un corps municipal chargé du gouvernement de la communauté, à moins qu'elle ne fasse que reconnaître une création antérieure, plus ou moins insurrectionnelle. Les rois de France (Louis VI et Louis VII en particulier) favorisent en bien des cas le mouvement d'émancipation urbaine et se font les protecteurs des bourgeois pour miner la puissance des seigneurs féodaux. D'importantes concessions sont faites, d'autre part, pour assurer le peuplement des « villes neuves » fondées pour animer le défrichement rural, tenir une route ou border une frontière. Les principaux privilèges personnels sont l'exemption de servitude et l'allégement des charges fiscales. Quant aux privilèges collectifs, le droit à la personnalité politique recouvre tous les autres, et notamment la prise de responsabilités en matière de justice et de défense. Manifestée par un certain nombre de droits symboliques (droit à la cloche et au beffroi, au sceau, à la maison commune), la franchise politique consiste, pour l'essentiel, dans le droit à l'association et au gouvernement propre. L'association politique des bourgeois résultait d'un serment mutuel de solidarité, constitutif, par exemple, de la commune, qui place dans un système de protection horizontal, entre pairs, des hommes pratiquement exclus du système de protection vertical du monde féodo-vassalique. Quant au gouvernement municipal, il est confié à l'assemblée des bourgeois ou des citoyens et, plus efficacement, aux organes élus ou cooptés qui en résultent.

On classe ordinairement les villes françaises en fonction des types d'organisation politique, qui sont stipulés par les chartes : villes de commune (dans le Nord), gouvernées par un maire et des échevins ou syndics, villes de consulat (dans le Midi), au gouvernement plus communautaire assuré par des consuls. De nombreuses villes n'accèdent pas à l'autonomie politique complète : ce sont, notamment dans le domaine royal, les villes de bourgeoisie, où le seigneur, qui est donc éventuellement le roi, conserve son droit, mais dans le cadre défini par les franchises civiles, fiscales et juridictionnelles concédées à une communauté de bourgeois incomplètement organisée et privée du droit au serment mutuel. Paris n'a que des franchises de ce type. La prévôté des marchands, héritière de la Hanse des marchands de l'eau, finit cependant au xive siècle par faire figure de municipalité, mais elle passe dès le xve siècle aux mains des gens du roi.

La même diversité de types se retrouve à travers toute l'Europe. Les villes d'Empire, surtout celles de l'Italie septentrionale et centrale, à un moindre degré celles de la Hanse, savent tirer parti de la faiblesse ou de l'éloignement du pouvoir impérial pour constituer parfois de véritables villes-États, comme Gênes, Pise, Venise, Sienne ou Florence. Au sein de l'organisation politique et économique de la Hanse, les grands ports de la mer du Nord et de la Baltique s'assurent eux aussi une réelle autonomie.

— Jean FAVIER

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  • : membre de l'Institut, directeur général des Archives de France

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