LINÉAIRE ALGÈBRE
Existence de bases
Théorème 8. Soit E un espace vectoriel sur K, soit L une partie libre de E, et S une partie génératrice de E contenant L. Il existe alors une partie basique B de E telle que L ⊂ B ⊂ S.
Nous allons démontrer ce théorème lorsque la partie S est finie.
Introduisons l'ensemble E ordonné par inclusion des parties libres T de E telles que L ⊂ T ⊂ S. L'ensemble E est non vide, puisque L appartient à E. La partie S étant finie, l'ensemble card(T) des entiers naturels, où T parcourt E, admet un plus grand élément p. Soit B un élément de E ayant p éléments. Montrons que B convient. Puisque B appartient à E, la partie B est libre, et L ⊂ B ⊂ S. Il reste donc à prouver que B est génératrice. Supposons en effet par l'absurde que le sous-espace vectoriel E′ engendré par B ne soit pas égal à E. Puisque S est génératrice, il existe un élément x de S n'appartenant pas à E′, ce qui implique que B′ = B ∪ {x} est encore libre. Ainsi, B′ est un élément de E ayant p + 1 éléments, ce qui contredit la définition de p.
Lorsque S est quelconque, la démonstration est analogue, le principe de récurrence étant remplacé par le théorème de Zorn.
Corollaire 1. Pour toute partie libre L de E, il existe une partie basique B de E contenant L ; pour toute partie génératrice S de E, il existe une partie basique B de E contenue dans S. En particulier, pour tout espace vectoriel E sur K, l'ensemble des bases de E est non vide.
Ce corollaire s'obtient en spécialisant le théorème aux trois cas suivants : S = E, L = ∅, S = E et L = ∅.
Corollaire 2 (théorème de la base incomplète). Pour toute partie libre L de E et pour toute partie génératrice S de E, il existe une partie S′ de S telle que L ∩ S′ soit vide et que B = L ∪ S′ soit une partie basique de E.
Voici l'une des principales conséquences du théorème précédent :
Théorème 9. Tout sous-espace vectoriel E′ d'un espace vectoriel E admet un sous-espace vectoriel supplémentaire dans E.
On choisit en effet une partie basique B′ de E′, que l'on complète en une partie basique B de E. Alors le sous-espace vectoriel engendré par B″ = B − B′ est un sous-espace vectoriel supplémentaire de E′ dans E.
Corollaire 1. Soit E et F deux espaces vectoriels sur K, soit E′ un sous-espace vectoriel de E, et U′ une application linéaire de E′ dans F. Il existe alors une application linéaire U de E dans F prolongeant U′.
Corollaire 2. Soit E et F deux espaces vectoriels sur K, soit F′ un sous-espace vectoriel de F, et ϕ l'application linéaire canonique de F sur F/F′. Pour toute application linéaire U de E dans F/F′, il existe une application linéaire V de E dans F telle que U = ϕ ∘ V.
Corollaire 3. Soit E et F deux espaces vectoriels sur K, et U une application linéaire de E dans F. Pour que U soit surjective, il faut et il suffit que U soit inversible à droite, c'est-à-dire qu'il existe une application linéaire V de F dans E telle que U ∘ V = IF. Pour que U soit injective, il faut et il suffit que U soit inversible à gauche, c'est-à-dire qu'il existe une application linéaire V de F dans E telle que V ∘ U = IE.
En effet, il est évident que, si U est inversible à droite (resp. à gauche), U est surjective (resp. injective). Réciproquement, si U est surjective, U définit un isomorphisme U′ d'un supplémentaire E′ de Ker(U) sur F ; il suffit de prendre pour V l'application linéaire de F dans E coïncidant avec U′-1. De même, si U est injective, U définit un isomorphisme U′ de E sur Im(U) ; il suffit alors de prendre pour V l'application linéaire nulle sur un supplémentaire F′ de Im(U), et coïncidant avec U′-1 sur Im(U).
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Écrit par
- Lucien CHAMBADAL : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de l'Université, professeur au lycée Buffon, Paris
- Jean-Louis OVAERT : agrégé de l'Université, ancien élève de l'École normale supérieure, professeur de mathématiques spéciales
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