LIṄGA
Dans l'hindouisme, le signe quasi exclusif du dieu Shiva : le membre viril symbolisé par une pierre dressée. Le linga (liṅga, mot sanskrit qui veut dire : « signe », « symbole distinctif ») est l'objet principal du culte dans les temples shivaïtes, dans les sanctuaires et au foyer familial, les représentations anthropomorphes de Shiva étant plus rares. La yoni, qui est le symbole de l'organe sexuel femelle (donc de la shakti, ou parèdre de Shiva), forme souvent la base du linga en érection : l'association des deux symboles rappelle au dévot que les principes mâle et femelle sont à jamais inséparables et qu'ils représentent ensemble la totalité de toute existence.
Des spécialistes pensent que le culte du linga existait dès l'Antiquité chez certains peuples non aryens de l'Inde, et de courts piliers cylindriques au sommet arrondi ont été découverts dans les ruines d'Harappa. Il semble que les Aryens védiques aient désapprouvé le culte du linga, mais des documents littéraires et artistiques prouvent qu'il était solidement implanté aux environs des ier et iie siècles. À partir de la période gupta, ses représentations commencent à adopter des formes conventionnelles : ce processus se traduisit par une forte dégradation du réalisme phallique originel. Dans le culte du linga, les fidèles apportent des fleurs fraîches, de l'eau pure, de jeunes pousses d'herbe, des fruits, de la verdure et du riz séché au soleil. Ils accordent une importance particulière à la pureté des objets du culte et à la propreté corporelle de l'adorateur. Supérieurs à tous les lingas sont les svâyambhuva liṅga (« auto-existants ») : la croyance veut qu'ils se soient créés d'eux-mêmes à l'aube des temps ; il y en a soixante-huit qui font aujourd'hui l'objet d'un culte dans les diverses régions de l'Inde. Certains sont de simples lingas faits en pâte de santal ou en argile fluviatile et sont détruits après avoir servi dans le rituel auquel ils étaient destinés ; d'autres, plus travaillés, sont en bois, en pierre précieuse, en métal ou en pierre. Les canons de la sculpture définissent avec exactitude les proportions à respecter pour la hauteur, l'épaisseur et la courbure du sommet. Les côtés et le sommet du mukhaliṅga portent de une à cinq images sculptées du visage de Shiva. Une autre icône que l'on rencontre souvent dans le sud de l'Inde est le liṅgōdbhavamūrti, qui porte la représentation de Shiva surgissant d'un linga de feu. C'est là une illustration du mythe shivaïte selon lequel, alors que les dieux Vishnu et Brahma se querellaient au sujet de leur importance respective, Shiva apparut sous la forme d'une colonne ardente pour modérer leurs présomptions. Brahma prit la forme d'une oie (haṃsa) et s'éleva dans les airs pour voir s'il pourrait découvrir le sommet de la colonne, tandis que Vishnu, prenant la forme d'un verrat, plongea à la recherche de sa base ; mais ils échouèrent tous les deux dans leur tentative et durent l'un comme l'autre s'incliner devant la supériorité de Shiva.
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