BENGALI LITTÉRATURE
Le temps de l'indépendance
La découverte de la littérature et de la pensée occidentales permit aux Bengalis de renouveler leur inspiration et leur technique dans un genre qu'ils avaient de tout temps pratiqué, la poésie, et aussi de s'essayer à des genres nouveaux, le roman et le théâtre moderne.
Le roman
Le roman, inspiré des maîtres anglais de l'époque, fut d'abord la peinture d'une société ; elle s'accompagnait d'une intention moralisante. Tekchānd Thākour et Kaliprasanna Sinha sont les premiers maîtres du récit. Avec Bankim Chandra Chatterji (1838-1894), le roman se fait historique. On y sent passer un souffle patriotique d'une grande vigueur. Dans ĀnandaMaṭh, il donne aux nationalistes indiens leur premier cri de ralliement. L'imagination de cet auteur, servi par une langue riche et sonore au phrasé ample et mélodieux, lui permit de prendre la première place parmi les romanciers indiens du xixe siècle. On lui doit une douzaine de romans et des essais littéraires et philosophiques.
Un certain idéalisme romantique se retrouve dans l'œuvre de Sarat Chandra Chatterji (1876-1938) qui s'attache cependant à brosser un tableau fidèle de la société de son temps. Romancier fécond et apprécié, il a le don de camper des personnages de marginaux et de déclassés inoubliables en même temps qu'il sait évoquer l'atmosphère feutrée des maisons bourgeoises où vivent dans une cohabitation difficile de nombreuses familles. Ses personnages féminins sont particulièrement forts et attachants.
Rabindranath Tagore, son contemporain (1861-1941), fut avant tout poète. Il écrivit cependant un petit nombre de romans dont le plus remarquable est Gorā, ample tableau de la vie intellectuelle et sociale de son temps. Ses nouvelles, les premières de la littérature bengali, sont des chefs-d'œuvre du genre. Elles atteignent à une perfection classique.
Le roman s'épanouit ensuite dans les œuvres de Bibhuti Bhushan Banerji (1896-1950), romancier de l'enfance et de l'adolescence villageoises. L'auteur de La Complainte du sentier (PatherPānchālī, à l'écran) est un maître qui sait évoquer remarquablement la campagne du Bengale. Il touche par la profondeur de sa vision et sa tendresse.
Tarashankar Banerji (1898-1971) est l'auteur d'une vingtaine de romans et de nouvelles très appréciées (Le Salon de musique). Il excelle dans la peinture des paysages et des hommes de son terroir. Admirateur de Gandhi, il se préoccupe de l'avenir des paysans dont il souhaite l'émancipation sociale et économique. Ses œuvres sont animées d'un grand souffle lyrique (Rādhā au lotus).
Manik Banerji (1908-1956) fit entrer Marx et Freud parmi les maîtres à penser des écrivains bengalis. Nombreux le suivirent dans l'Union des écrivains progressistes. Il est l'auteur de trois romans qui font date et d'un nombre important de nouvelles.
La littérature narrative est en plein épanouissement. Tandis que les problèmes de forme prennent une importance grandissante, les auteurs utilisant toutes les ressources de la langue, dialectes, patois, argot, langue littéraire – Kamal Majumdar par exemple a une écriture très originale –, les grands thèmes sociaux continuent de nourrir la fiction : ainsi, Satinath Bhaduri est l'auteur d'un roman devenu classique sur la lutte pour l'indépendance. Parmi les autres romanciers, mentionnons Premendra Mitra, Achintyakumar Sengupta, Buddhadev Bose, Annadashankar Ray, Samaresh Basu, Bimal Kar... Subodh Ghosh et Narayan Gangopadhyay se sont illustrés dans la nouvelle.
Au Bengale oriental, aujourd'hui le Bangladesh, le romancier le plus important a longtemps été Syed Waliullah (1922-1971). Les romanciers se consacrent à la peinture des milieux sociaux défavorisés (Abu Ishaq, Sūrya-dighalbāḍi) et des villageois des diverses[...]
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Écrit par
- France BHATTACHARYA : professeur émérite de l'Institut national des langues et civilisations orientales
- Jharna BOSE : maître ès arts, université de Jadavpur, Calcutta
Classification
Média
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