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NORDESTE LITTÉRATURE DU

Le Nordeste a été la région du Brésil la plus anciennement colonisée, Salvador de Bahia le premier siège du gouvernement colonial portugais dont la richesse économique provenait des moulins à sucre. La sédimentation ethnique et culturelle de cette vaste région, qui a été ultérieurement déclassée par celle des Mines Generales puis par l'axe Rio de Janeiro-São Paulo, explique en partie la variété de sa production littéraire moderne et singulièrement de son roman.

Dans les années 1920, alors qu'on commence à parler des courants d'avant-gardes modernistes du Sud, Gilberto Freyre (1900-1987) et quelques Nordestins se posent comme « traditionalistes régionalistes », avec une tendance à se sentir les plus brésiliens des Brésiliens. Alors, la culture baroque coloniale, la production des Académies et le romantisme de José de Alencar (1829-1877) et de Castro Alves (1847-1871) ne sont plus que des vestiges prestigieux du passé dans une région en pleine léthargie. En revanche, la culture orale et le fonds folklorique et langagier restent très vivants. Les vieilles oligarchies rurales du Pernambouc sont en décadence, mais Gilberto Freyre, le jeune maître à penser d'alors (Maîtres et esclaves, 1933), veut mettre en valeur le patrimoine régional — orientation formulée dans le Manifeste du Ier Congrès régionaliste brésilien (1926).

La réflexion anthropologique sur la formation de la société patriarcale imprégnée par les cultures d'Afrique proposée par Freyre exerce une influence déterminante sur le romancier José Lins do Rego (1901-1957). Dans une langue très plastique, une prose débordante, il donne aux types d'une société en extinction une dimension épique, exaltant non seulement les seigneurs des moulins à sucre, mais encore les descendants d'esclaves et en particulier les métis qui entreprennent leur ascension sociale. Avec Fogo morto (1943), il atteint la synthèse de la saga subjective d'une région et d'une culture. Au cycle de la canne à sucre succède celui du cangaço, mouvement anarchique de bandits d'honneur redoutés de la zone semi-aride de l'intérieur.

Dans d'autres centres régionaux surgissent des écrivains qui vont découvrir petit à petit leur parenté de génération, qui sera celle « du roman social des années trente ». Chronologiquement, José Américo de Almeida (1887-1980) inaugure en 1928 avec A Bagaçeira, dont le message de dénonciation est porté tout autant par la maîtrise du registre symbolique que par celle de la langue, qui incorpore avec dextérité les traits régionaux. Puis vient le roman de Rachel de Queiroz (1910-2003), O Quinze, récit plus dépouillé des drames humains de la sécheresse de 1915 dans l'État du Ceara. La richesse verbale et la sagacité psychologique font du personnage éponyme d'un second roman, Jean Miguel (1932), le représentant émouvant de cette humanité souffrante.

Par la densité de son œuvre, Graciliano Ramos (1892-1953) prend dans ce courant une stature de classique. Dans Angûstia (1936), il donne la parole à un petit fonctionnaire d'une famille traditionnelle déchue qui dénonce les rouages implacables de la société bourgeoise. Les deux autres volumes d'une trilogie, S ao Bernardo et Vidas Sêcas, complétaient la dimension rurale d'une œuvre subversive qui lui valut d'être mis en prison par la dictature de Vargas. Le témoignage bouleversant et sans complaisance de ce séjour, Memórias do Carcere, ne sera publié qu'en 1953.

La magie de la Bahia de Jorge Amado ne doit pas masquer les autres aspects de la réalité littéraire bahianaise. Mentionnons Adonias Filho (1915-1990), romancier par excellence des plantations de cacao du sud de Bahia (Corpo vivo, 1963). Le cadre régional n'en demeure pas moins secondaire par rapport à l'approfondissement du drame existentiel des personnages. Herberto Sales[...]

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, chargé de recherche au CNRS

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