- 1. Perrault et nous : les « enfants de la vidéosphère »
- 2. Un espace aux frontières incertaines
- 3. La littérature de jeunesse et l'édition
- 4. L'esthétique baroque et l'épreuve de la raison
- 5. Après Jean-Jacques Rousseau
- 6. Les pouvoirs de l'illustration : du conte au documentaire
- 7. Les mondes graphiques
- 8. Poésie et théâtre
- 9. Écriture et réécritures : l'exemple de Robinson
- 10. Bibliographie
JEUNESSE LITTÉRATURE POUR LA
Après Jean-Jacques Rousseau
Quittant le merveilleux, la mode du « conte moral » au xviiie siècle fut, beaucoup plus que celle des contes mondains, proche des Conversations et proverbes de Mme de Maintenon qui posait à Saint-Cyr, pour les jeunes filles de l'aristocratie, les bases du théâtre d'éducation. Cette mode se voulut conviviale et Arnault Berquin, s'inspirant du premier périodique allemand de Weysse, créa L'Ami des enfans en 1782-1784 et L'Ami de l'adolescence en 1784-1785, brefs périodiques, ensuite réédités sous forme de livres : il y présenta des anecdotes sur la vie de tous les jours pour appliquer la pédagogie qu'il tirait de la lecture de l'Émile ou de l'Éducation (1762) de Jean-Jacques Rousseau. Dans ses Lectures pour les enfans, recueil de contes, d'anecdotes et de traits de vertu, choisi des meilleurs auteurs, il reproduisit Jeannot et Colin de Voltaire et Les Troglogytes de Montesquieu, alors que Mme Leprince de Beaumont, qui lança en 1756 son Magasin des Enfans, suivait le même modèle, mais incluait néanmoins La Belle et la Bêtedans son volume. Un recueil de 1806 est significatif de l'esprit de l'époque : il s'intitule Contes moraux pour l'instruction de la jeunesse par Mme Leprince de Beaumont. En effet, les révolutionnaires de 1789 ne purent pas constituer un livre d'enseignement primaire, malgré la création tardive d'une École normale. Quant au Comité d'instruction publique, il s'employa à composer en 1793 un Tableau des actions héroïques et vertueuses, qui fut interrompu après quelques livraisons. De son côté, Laurent-Pierre Bérenger, dans son Nouveau Magasin des petits enfans, s'en prenait à « la Révolution qui a laissé un vide de principes moraux et littéraires qu'il semble impossible de remplir ». L'édit de 1791 ayant libéré le théâtre, c'est vers ce genre que se portèrent les talents. Dès lors, il ne restait dans le projet d'éducation publique de la jeunesse, avec les « catéchismes républicains » et en dehors du mélodrame qui fut « la moralité de la Révolution », que la célébration de la vie simple et des devoirs de la vertu ou l'héroïsme des grands hommes.
Le retour « aux rêveries d'un peuple enfant » fut assuré, sous l'influence de Gérard de Nerval, par « l'excentrique » Nodier, qui s'inspirait du romantisme allemand avec Trilby (1822) suivi de Histoire du chien de Brisquei (1930), La Fée aux miettes (1832), Trésor des fèves et fleur des pois (1833). Le mouvement recevait son impulsion de la traduction à partir de l'anglais des contes de Grimm, sous le titre Vieux Contes pour l'amusement des grands et des petits enfants (1824). Quant aux contes d'E. T. A. Hoffmann, lus dans le texte, ils ne seraient traduits qu'en 1832, précédant ceux d'Hans Christian Andersen en 1848 et les contes populaires russes, révélés par Afanassiev vers 1860 et traduits en 1913.
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Écrit par
- Jean PERROT : professeur émérite de l'université de Paris-XIII, président fondateur de l'Institut international Charles-Perrault
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Médias
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