LOBI
Les Lobi peuplent une région qui s'étend entre le 9e et le 11e degré de latitude nord et entre le 5e et le 6e degré de longitude ouest, de part et d'autre de la frontière séparant le Burkina Faso de la Côte-d'Ivoire, sur la rive droite de la Volta Noire. Ils forment une population de 1 million de personnes environ, en majeure partie (650 000) sur le territoire ivoirien . Un mouvement migratoire lent et continu, qui aurait, selon la tradition, conduit les Lobi de la Moyenne-Côte au nord du Ghāna, puis, après la traversée de la Volta Noire vers la fin du xviiie siècle, dans l'actuel territoire lobi du Burkina Faso, s'est orienté depuis le début du xxe siècle vers le nord de la Côte-d'Ivoire. Ces migrations, motivées surtout par la recherche de terres meilleures, dépeuplent peu à peu les villages lobi du Burkina Faso. Sur le plan culturel, les Lobi se rattachent aux petits groupes touna et dian, leurs voisins occidentaux, et aux Birifor, aux Dagari et aux Wilé, leurs voisins orientaux, que l'administration coloniale française et anglaise ainsi que les premiers ethnographes ont souvent assimilés aux Lobi. Les Lobi parlent une langue voltaïque , apparentée à celle des Dian et tout à fait distincte des parlers birifor-dagari-wilé du groupe voltaïque mossi.
Les Lobi vivent principalement de l'agriculture (mil, maïs, haricots, arachides, pois de terre, patates douces, ignames, tomates et, plus récemment, riz et coton). Les Lobi sont également éleveurs ; mais les bovins, ainsi que les moutons et les chèvres, constituent essentiellement des biens de prestige, servant aux transactions matrimoniales et aux sacrifices ; les vaches ne sont pas traites. La chasse ne représente qu'une activité secondaire, fournissant à l'occasion une nourriture d'appoint. Les produits de la cueillette n'entrent pas pour une grande part dans l'alimentation, en dehors des noix de karité (beurre) et des fruits du néré.
Considérés par les premiers ethnographes comme matrilinéaires, les Lobi forment en fait une société à filiation bilinéaire avec accentuation des relations utérines. Double filiation, à tendance cognatique en réalité, puisque, dans les contextes pratiques où les relations utérines sont accentuées, un individu relève de deux groupes : le matrilignage de sa mère d'une part, le matrilignage de son père d'autre part. Le clan maternel porte un nom qui lui est propre, à caractère totémique, et qui est composé de deux moitiés exogames à fonction politique et matrimoniale : les Wo (considérés comme « purs » Lobi) et les De (d'origine étrangère, captifs ou réfugiés).
Eux-mêmes largement segmentés, les clans matrilinéaires sont considérés comme issus de la segmentation de quatre grandes familles originelles : Kambou, Da, Hien et Palé, que l'on retrouve chez les Birifor, les Dagari et les Wilé. Ces quatre familles sont associées deux à deux en « relations de plaisanterie ». Le clan patrilinéaire possède aussi un nom et peut être localisé ; du vivant du père, la résidence est patrilocale ; après le décès du père, elle devient avunculocale ; le clan de la lignée patrilinéaire joue un rôle prédominant dans le rituel d'initiation du dioro.
Quant à l'héritage, il est transmis dans les deux lignées de façon différenciée : la terre, la maison, les fétiches personnels sont hérités en ligne patrilinéaire ; les biens meubles en ligne matrilinéaire.
Avant la colonisation, les conseils de village, constitués des chefs de famille, étaient les seules institutions proprement politiques ; aujourd'hui, malgré la mise en place par l'administration de chefs de canton et de village, la structure politique traditionnelle s'est maintenue dans ses grandes lignes. Elle dérive largement de l'organisation religieuse : au niveau du village, en effet, la communauté territoriale[...]
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Écrit par
- Alain MOREL : ethnologue
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