- 1. Raisonnement et prédication
- 2. L'art de la controverse
- 3. La doctrine de l'inférence
- 4. Logique, grammaire et perception
- 5. Le mot et la chose
- 6. Le syllogisme en cinq parties
- 7. Théorie de l'argumentation : essais de formalisation
- 8. Logique et connaissance
- 9. Le problème des universaux
- 10. Bibliographie
LOGIQUE INDIENNE
Logique et connaissance
Or toute inférence qui tire ιpε s de ιpε h est elle-même traitée comme analogue au passage d'un mot (perçu) à un objet (non perçu) que ce mot désigne. Donc la connaissance d'une fumée (H = qu'à l'emplacement de cette montagne il y a de la fumée) sera appelée « cause efficiente » (kāraṇa) de la connaissance d'un feu (S = qu'à l'emplacement de cette montagne il y a du feu). Dans le Navya- Nyāya, la relation correspondante qui unit deux connaissances du type H et S reçoit le nom de « vyāpti-jñāna » (connaissance de l'implication), c'est-à-dire par rapport à l'exemple : « vāhni-vyapyo dhūmaḥ » (fumée imprégnée de feu) ; on considère que toute connaissance particulière est reliée au sujet connaissant (ātman) par l'inhérence (samavāya), terme qui désigne à la fois la relation entre substance (dravya) et qualité (guṇa), et la relation entre un tout (avayavin) et ses parties (avayava). Le processus qui produit un effet à partir d'une cause est appelé « opération » (vyāpāra). Dans le cas particulier de la connaissance opératoire de l'implication, cette opération est désignée par le terme « parāmarśa » (conception), c'est-à-dire par rapport à l'exemple : vyāpti-viśiṣṭa-pakṣa-dharmatā-jñāna (connaissance de la présence de ce qui est qualifié par la vyāpti [c'est-à-dire de la fumée] à l'emplacement de l'objet [c'est-à-dire à la montagne]). La cause H, jointe au parāmarśa, produit l'effet S. On peut considérer cela comme l'application de la règle d'instanciation universelle à ∧ x(x ε h → x ε s) ; cette application aboutit à ιpε h → ιpε s, et à partir de là, étant donné que H et S sont respectivement les nominalisations des propositions élémentaires ιpε h et ιpε s, on n'a plus qu'à appliquer la règle du modus ponens pour obtenir S à partir de H.
Dans le Nyāya ancien, H était considérée comme étant à elle seule la cause de S. Donc, une fois qu'on eut amendé le troisième membre du syllogisme à cinq membres en énonçant explicitement la vyāpti « partout où [il y a] fumée, là [est] du feu », on interpréta le second membre comme une abréviation de « à cause de la fumée qui est imprégnée de feu ». Cela demeura l'interprétation courante de la tradition classique jusqu'à nos jours : le manuel de Tarkaṣamgraha rédigé par Annaṃbhaṭṭa (première moitié du xviie siècle) est encore utilisé dans les écoles de sanscrit comme une sorte de >propédeutique logique<.
Après Gaṅgeśa, le Navya-Nyāya poursuivit (à Mithilā, au Bihār) des études de plus en plus subtiles sur la vyāpti, qui ont abouti à l'élaboration d'un sanscrit extrêmement spécialisé et technique. Grâce à cette langue, le logicien Raghunātha (vers 1475-1550), doué d'assez de puissance intellectuelle pour fonder (à Navadvīpa au Bengale) une école à lui, put construire par exemple une logique relationnelle d'un ordre plus élevé possédant en outre la capacité de traiter les questions de composition logique dans le plus grand détail, y compris les quantificateurs. Par exemple, l' assertion de l'adjonction « le lieu où il y a du feu est un lieu où il y a de l'eau ou le lieu où il y a du feu est un lieu où il y a une montagne » est exprimée par l'assertion d'une propriété particulière du feu, c'est-à-dire : il y a du feu [là où il y a] de l'eau ou à [l'emplacement] d'une montagne. Beaucoup de détails attendent encore d'être reconstruits selon les techniques de la logique formelle moderne.
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Écrit par
- Kuno LORENZ : docteur en philosophie, professeur de philosophie
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