- 1. Les buts de la démarche scientifique
- 2. Les lois universelles et le problème de l'induction
- 3. Les paradoxes de la confirmation
- 4. Lois et explication
- 5. Les lois sont-elles des vérités nécessaires connaissables a priori ?
- 6. Lois, causalité, régularités et contrefactuels
- 7. Conclusion : pourquoi le mot « loi » n'est pas ambigu
- 8. Bibliographie
LOI, épistémologie
Les lois sont-elles des vérités nécessaires connaissables a priori ?
Non seulement il existe des explications statistiques qui reposent sur des régularités statistiques non universelles, mais il existe des explications authentiques qui ne sont ni causales ni statistiques : une démonstration ou une preuve mathématique explique pourquoi un théorème est vrai (non probablement vrai) compte tenu des axiomes, sans cependant révéler ses causes.
Certaines prédications et identités sont des lois non causales comme en témoigne l'échantillon suivant : « Tous les photons ont une masse gravitationnelle » ; « La température d'un corps n'est autre que l'énergie cinétique moyenne des molécules composant le corps » ou « La foudre est une décharge électrique » ; « Une molécule d'eau est composée de deux atomes d'hydrogène et d'un atome d'oxygène » ou le modèle en double hélice d'une molécule d'acide désoxyribonucléique (ADN).
Toutes les lois – causales ou non – posent le problème fondamental (cf. supra, Les buts de la demande scientifique) suivant : comment concilier le fait causal – souligné par les empiristes – que pour acquérir des connaissances « nomologiques » les humains doivent interagir avec l'environnement avec le fait que les lois décrivent non seulement des phénomènes observés mais dévoilent ce qui se produirait dans des circonstances hypothétiques irréalisées. Les rationalistes classiques qualifiaient ces propositions de vérités de raisons, nécessaires et connaissables a priori. Les empiristes répudient ces prédicats ou les réservent aux propositions purement mathématiques et qualifient les lois de vérités de fait, contingentes et connaissables a posteriori. L'essentialisme épousé par Kripke (1972) a renouvelé le dilemme traditionnel entre le rationalisme et l'empirisme en faisant valoir que les paires de prédicats a priori/a posteriori et nécessaire/contingent n'ont pas la même extension. Kripke fournit des raisons de tenir pour des vérités nécessaires et non contingentes – si elles sont vraies – l'identité exprimée par « Eau = H2O » ou la loi d'Ohm, « E/I = R ». Simultanément, il admet que ces vérités nécessaires sont connaissables a posteriori et non a priori.
Selon l'essentialisme, une loi (causale ou non) est douée d'une modalité « aléthique » : elle est nécessairement vraie, si elle est vraie ; elle décrit non seulement ce qui est mais ce qui doit être. L'empirisme objectera à l'essentialisme qu'on nomme « loi » une proposition comme la troisième loi de Kepler dont on sait depuis Newton qu'elle est stricto sensu fausse, a fortiori ne peut-elle pas être « nécessairement » vraie. L'essentialisme répond qu'une loi étant une vérité nécessaire si elle est vraie, peut-être n'en connaissons-nous aucune.
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Écrit par
- Pierre JACOB : chargé de recherche en philosophie au C.N.R.S., membre du Centre de recherche en épistémologie appliquée
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