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PAUVRES LOIS DES

Le miséreux, dans l'Angleterre d'Élisabeth Ire comme dans celle de Victoria trois siècles plus tard, n'est pas seulement une victime qui mérite la charité de cœurs chrétiens ; c'est aussi un marginal dangereux pour l'ordre social.

Organiser par un code de lois une série de mesures protectrices de la société plus que de l'individu secouru est devenu une mission permanente de l'État et a valu à l'Angleterre, par ses « lois des pauvres » successives, de figurer à un rang de précurseur.

Estimés à l'ère pré-industrielle à la moitié de la population, leur proportion fixée à quelque 25 à 30 p. 100 de la population urbaine par les sociologues de la fin de l'époque victorienne, les pauvres constituent une masse inquiétante : les mettre au travail a longtemps paru plus raisonnable que de leur verser des secours à domicile, de même que faire la distinction entre les véritables indigents et les victimes de « vices », paresse, alcoolisme, imprévoyance. Pendant longtemps aussi, il a semblé impossible d'affronter le coût d'une assistance publique sans la levée d'une taxe spéciale, et injuste de faire peser le poids d'une telle taxe sur tous les citoyens sans tenir compte de leur habitat : d'où le choix d'un cadre local, paroissial ou plus large. Les lois des pauvres sont ainsi des mesures ordonnées par l'État central pour être mises en œuvre par des autorités locales, sous la surveillance éventuelle de responsables désignés par le pouvoir.

Au départ, on a connu la législation élisabéthaine : après des mesures partielles en 1572 et en 1576, une loi générale en 1597, la grande loi des pauvres, est promulguée en 1601 ; elle demeure en vigueur jusqu'en 1834 et confie à des notables paroissiaux, sous la surveillance des juges de paix, l'assiette et la levée d'une taxe des pauvres et les formes de secours, en travail ou en nature, à attribuer ; en 1662, l'Act of Settlement renforce le cadre paroissial en restreignant les secours aux originaires de la paroisse... et en ordonnant le transfert vers leur paroisse d'origine des miséreux. Par la suite, dans un souci d'économies, on voit naître des hospices des pauvres ou Workhouses, le premier en 1697 à Bristol, souvent au prix de l'association de plusieurs paroisses. Les abus, et aussi un nouvel esprit philanthropique, poussent à plus de générosité dans les années 1790 et l'Angleterre connaît un temps le Speenhamland System, du nom d'une localité du Berkshire où les juges de paix, réunis là en 1795, avaient défini une sorte de minimum vital garanti et un système de secours à domicile (out-door relief).

En 1834, le coût du système, en pleine révolution industrielle, paraît exorbitant. Il contribue à la fuite vers les banlieues et les campagnes de la bourgeoisie riche des grandes cités. Le Parlement se rallie au schéma d'un véritable technocrate, Edwin Chadwick, et vote la « nouvelle loi des pauvres » : elle repose sur les principes d'uniformité (le même système partout), d'efficacité et de « choix ultime » (less eligibility) des miséreux, que l'on veut contraindre à entrer dans des hospices, véritables « bastilles », à la discipline rigoureuse, où les familles sont séparées, le travail obligatoire, et où vêtements et nourriture doivent être pires que ceux de l'ouvrier le moins bien payé ; Des unions de paroisses sont systématiquement organisées dans le cadre d'une exceptionnelle centralisation londonienne, et on entre dans l'ère horrible des Workhouses, certains de sinistre renommée. Bien que moins d'un cinquième des indigents aient pu être réellement secourus de la sorte (in-door relief), l'impression produite est durable.

En 1871, la gestion du système est à nouveau décentralisée et, surtout, à partir[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle

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  • ROYAUME-UNI - Histoire

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  • SALARIAT

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