LONGUE MARCHE (LA)
Épopée militaire que l'on a comparée aux plus fabuleux exploits guerriers de l'histoire, la Longue Marche (Chang Zheng) constitue le meilleur symbole de l'accomplissement de la révolution chinoise. Elle a pour origine une défaite : celle de l'Armée rouge acculée dans ses bases rouges de plus en plus réduites par les troupes nationalistes du Guomindang (GMD) commandées par Tchiang Kai-chek. Après la terreur blanche qui a suivi la Commune de Canton en 1927, Mao Zedong et Zhu De se sont réfugiés dans la zone des monts Jinggang, au Jiangxi, avec ce qui leur reste de troupes, pour y former un soviet local, tandis que la direction du parti communiste, dont le secrétaire général est Li Lisan, réside à Shanghai. Mao Zedong et Zhu De se sont opposés à Li Lisan, partisan d'attaques frontales contre les centres urbains, alors que le GMD lance ses « campagnes d'anéantissement » contre les soviets du Jiangxi et que le Japon envahit la Mandchourie (1931).
Au moment où Mao Zedong était désigné à la conférence de Ruijin comme président du premier gouvernement pan-chinois soviétique, le GMD, qui a lancé sa sixième campagne d'anéantissement, enserre l'Armée rouge dans un blocus sévère qui l'étouffe tactiquement et la mine par les privations qu'il entraîne. Les dirigeants des soviets décident alors de forcer le blocus et d'effectuer une retraite stratégique vers l'ouest où se trouvent d'autres zones rouges (He Long). En fait, outre le corps principal de Mao Zedong et Zhu De, plusieurs autres concentrations de troupes communistes vont participer à cette retraite stratégique effectuée en plusieurs temps : il s'agit de celles de He Long, Xiao Ke, Xu Xiangqian, Fang Zhimin. Le premier groupe à effectuer la percée est celui de Fang Zhimin, baptisé « corps d'avant-garde de l'expédition du Nord pour la résistance contre le Japon », indication de la volonté manifeste des révolutionnaires de s'opposer à l'impérialisme nippon. Il pratique l'ouverture en juin 1934, suivi de Xiao Ke, en août, qui cherche à faire la jonction avec He Long.
Mais ces mouvements ne sont que des diversions. Mao Zedong et Zhu De, dirigeant le gros de l'Armée rouge (environ 130 000 hommes, dont 12 000 civils), vont alors forcer précipitamment les lignes fortifiées du GMD. Dès ses débuts, l'entreprise se révèle d'une âpreté exceptionnelle malgré l'effet de surprise qui permet de bousculer les nationalistes (un million, dont 400 000 encerclent le Jiangxi). Constamment talonnés et harcelés, les communistes se fraient un difficile passage grâce à des séries de marches et de contremarches hardies et déroutantes qui leur permettent de progresser vers l'ouest. Mais, après les réunions de Tongdao et Liping, l'épuisement est général, l'équipement réduit, et les effectifs ont fondu de 60 p. 100.
Du 6 au 8 janvier 1935 se tient, à Zunyi, au Guizhou, une conférence décisive : elle place Mao Zedong, pour la première fois, à la tête du comité central du P.C.C., le tirant ainsi de sa position jusqu'alors minoritaire. Ce n'est donc qu'à partir de cette date que Mao Zedong aura, avec ses fidèles (Zhu De, Peng Dehuai, Lin Biao, Liu Bocheng), l'initiative du pouvoir contre la puissante faction dite des vingt-huit bolcheviks. Ce tournant, à la fois militaire et politique, est un important jalon de la Longue Marche qui va s'exprimer par de nouvelles résolutions affirmant les tâches de l'Armée rouge et du parti. La stratégie et la politique maoïstes vont désormais peser pour beaucoup sur l'avenir de la révolution.
Mais cette prise du pouvoir politique, Mao Zedong ne va pas l'assurer sans oppositions : des divergences sérieuses sur les principes stratégiques et tactiques (destination finale de la retraite, objectifs, itinéraire)[...]
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Écrit par
- Michel HOANG : journaliste
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