HAMELIN LOUIS-EDMOND (1923-2020)
Connu comme le « père de la nordicité », Louis-Edmond Hamelin est une figure marquante de la géographie québécoise et canadienne. Son parcours transdisciplinaire, sa pensée humaniste, son engagement pour les peuples autochtones, de même que sa vision holistique de la géographie caractérisent l’ensemble de son œuvre.
Né le 21 mars 1923, Louis-Edmond Hamelin passe son enfance dans le village de Saint-Didace au nord-est de Montréal. Il obtient un baccalauréat ès arts (latin-grec) à l’université de Montréal, en 1945, puis une maîtrise en sciences économiques à l’Université Laval trois ans plus tard. Son intérêt pour la géographie se précise pendant ces années alors qu’il reçoit, en 1947, une bourse de la Société géographique royale du Canada. En 1948, il effectue un premier voyage dans le Nord, à la baie James, où il prend conscience de la richesse des cultures autochtones mais aussi des inégalités que ces peuples subissent au Canada. La même année, il entame des études universitaires en France, à l’Institut de géographie alpine de Grenoble. C’est là qu’il fait la connaissance de Colette Lafay, qui deviendra sa compagne de vie et collaborera à plusieurs de ses travaux. Après un doctorat universitaire en géomorphologie obtenu à Grenoble en 1951 – Raoul Blanchard est membre du jury –, il est professeur à l’Université Laval (1951 à 1978). Il suit parallèlement des stages au Scott Polar Research Institute de Cambridge (1964 et 1974) et soutient sa thèse de doctorat ès lettres à Paris (1975) sous la direction de Pierre George.
Dans les années 1950, la géographie universitaire commence alors à émerger au Québec, notamment grâce aux travaux de Raoul Blanchard et Pierre Dagenais. Louis-Edmond Hamelin s’inscrit dans cette mouvance et, grâce à lui, la géographie québécoise prend son envol en tant que discipline à part entière. Comme directeur de l’Institut de géographie (1955-1961), il s’implique dans la création et la direction des Cahiers de géographie du Québec. Pendant cette période, Hamelin travaille également à la création du département de géographie de l’Université Laval dont un des éléments clés sera la création d’un centre de recherche dédié aux connaissances sur les régions nordiques. Après avoir rédigé un mémoire sur la création d’un tel centre, il est invité en 1961 à accompagner René Lévesque – alors ministre des Ressources naturelles dans le gouvernement québécois de Jean Lesage – dans la région de l’Ungava ( aujourd’hui Nunavik). L’intégrité du Québec (Dorion, 1971) et la gouvernance de sa partie septentrionale sont alors des enjeux centraux de la politique québécoise. L’initiative de Hamelin de développer la recherche nordique arrive donc à point nommé : le Centre d’études nordiques (CEN) est créé conjointement par l’Université Laval et le gouvernement du Québec en 1961, et Hamelin en assumera la direction jusqu’en 1972.
Malgré ses nombreuses responsabilités administratives, Louis-Edmond Hamelin ne délaisse pas la recherche. Ses travaux sur le Nord progressent, soutenant sa réflexion sur un concept capable de cerner un domaine d’études et d’englober les réalités multiples de cette région, incluant son « autochtonie ». Fidèle à sa première formation de linguiste, Hamelin cherche un nouveau mot afin d’établir sa pensée : ce sera « nordicité ». Dans son ouvrage Nordicité canadienne, paru en 1975, le néologisme désignait le « niveau polaire dans l’hémisphère boréal ». Ce niveau, variable selon la région géographique, est évalué à l’aide de son indice de valeur polaire (VAPO), que l’on mesure, dans le système de Hamelin, à l’aide de dix critères, six se référant à des phénomènes naturels (latitude, moyenne de température en été, moyenne annuelle de température, type de glace, précipitations annuelles, type[...]
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Écrit par
- Caroline DESBIENS : professeure titulaire, département de géographie de l'université Laval, Québec (Canada)
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