LE VAU LOUIS (1612-1670)
Succédant à Jacques Le Mercier avec le titre de premier architecte, puis d'intendant et d'ordonnateur général des Bâtiments royaux, Le Vau a régné sur l'architecture française à partir de 1654. Une riche clientèle privée, la protection de Mazarin, le coup d'éclat de Vaux-le-Vicomte, la faveur royale (il a l'oreille de Louis XIV, et Colbert s'en inquiète dans une lettre du 28 septembre 1663) lui ont assuré une carrière exceptionnellement brillante et lui ont valu d'être au centre de toutes les grandes entreprises royales, avec son élève et fidèle collaborateur François d'Orbay.
Pour sa clientèle privée, il construit entre autres : les hôtels Lambert (1640) et Tambonneau (1642), les châteaux de Saint-Sépulcre, du Raincy, de Meudon, de Vaux (1656-1661), et encore l'hôtel de Lionne (1662). Pour Mazarin, il bâtit le château neuf de Vincennes (pavillons dits du roi et de la reine, portique et bel arc triomphal, à partir de 1653) et, après la mort du cardinal, élève le collège des Quatre-Nations (aujourd'hui l'Institut) : le rythme de la vaste façade concave, l'ordonnance de la chapelle précédée d'un portique donnent à l'ensemble de la puissance et de l'harmonie. En 1657, enfin, il édifie la Salpêtrière.
À partir de 1654, nommé premier architecte du roi, il donne tous ses soins au Louvre, aux Tuileries et à Versailles. Au Louvre, il dessine la façade méridionale sur la Seine, qui disparaîtra lors de travaux ultérieurs. En 1662, il commence les fondations (retrouvées au cours des fouilles de 1964) de l'aile orientale. Mais les travaux sont interrompus en janvier 1664. Après l'échec de Bernin, Le Vau est associé, en 1667, à Claude Perrault, à Le Brun et à François d'Orbay pour élaborer un projet qui aboutira à la construction de la colonnade.
À Versailles, de 1661 à 1665, une première campagne de Le Vau débute par la construction de l'Orangerie et de la Ménagerie et le remaniement complet du Château Vieux de Louis XIII. Ici s'exprime le goût baroque de Le Vau, influencé par l'italianisme. Il joue des oppositions d'ombres et de lumières, de droites et de courbes (les deux demi-lunes), il imagine un décor animé (bustes sur consoles, vases) et très coloré (grilles bleues, balcon vert, épis de faîtage dorés, marbres). En 1668, nouvelles transformations ; mais on tâtonne et Colbert s'impatiente : « Tout ce qu'on projette de faire n'est que rapetasserie qui ne sera jamais bien. » Dans ce climat peu propice, Le Vau dessine un projet (1669). Mais ce qui sera bâti est si différent de ce qu'il a fait jusque-là que la critique moderne, déconcertée, parle d'une crise, d'un renouvellement du style. Or, Laprade a montré qu'à cette époque l'architecte est retenu loin de Paris par les difficultés qu'il rencontre dans l'exploitation de ses manufactures du Nivernais. Il revient dans la capitale, malade et abattu, pour y mourir quelques mois plus tard. En son absence, c'est François d'Orbay qui a pris les responsabilités, dessiné les plans, veillé à l'exécution. Ce Versailles de 1669-1670.
Les œuvres de Le Vau manquent sans doute de la grâce et de la finesse de dessin qui caractérisent celles de François Mansart. Mais il a le goût des nobles ordonnances scandées par l'ordre colossal, du modelé des formes, d'une certaine surcharge décorative : en cela, on peut voir en lui le plus baroque des architectes français de son temps.
Bibliographie
H. Ballon, Louis Le Vau, Mazarin's College, Colbert's Revenge, Princeton University Press, Princeton, 1999 N. Courtin dir., L'Île Saint-Louis, Action artistique de la Ville de Paris, Paris, 1997
A. Cojannot, « Louis Le Vau, les débuts d'un architecte parisien (1612-1654) », in [...]
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Écrit par
- Jean-Jacques DUTHOY : professeur à l'École européenne de Bruxelles
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