PASTEUR LOUIS (1822-1895)
Pasteur et la vaccination
Pasteur utilise le mot vaccination pour désigner l'injection préventive, dans le sang d'un individu, d'un germe microbien pathogène dont la virulence avait été artificiellement atténuée. Cela immunisait l'individu contre la maladie en cas de rencontre ultérieure avec le germe virulent. Le terme vaccination rendait hommage à une pratique empirique, généralisée par le médecin anglais Jenner au xviiie siècle : l'injection de broyats de pustules de vaches atteintes de cow-pox (ou vaccine), maladie bénigne qui immunisait l'homme contre la variole, fléau très redouté à cette époque.
On savait depuis l'Antiquité qu'un patient guéri d'une maladie contagieuse (variole, rougeole, scarlatine, oreillons) ne contractait jamais une deuxième fois la maladie. Cette absence de récidive avait même incité certains médecins du xviiie siècle à pratiquer, en reprenant d'anciennes méthodes chinoises, l'inoculation préventive à des enfants de broyats de croûtes de varioleux pour tenter de les protéger contre la variole ; les résultats étaient beaucoup plus aléatoires que ceux de la vaccination jennérienne. La question de l'utilité de « l'inoculation » restait donc encore très discutée au xixe siècle ; cette question s'inscrivait d'ailleurs parfaitement dans le cadre des grands débats sur les mécanismes de l'évolution soulevés à cette époque.
Pasteur, qui n'était pas du tout naturaliste, était attiré par le lamarckisme (où il pouvait retrouver les desseins d'un Créateur tirant les êtres vivants vers toujours plus de perfection), tandis que son grand rival allemand, Robert Koch, était un adepte convaincu du darwinisme. On ne trouve donc, dans les œuvres de Pasteur, aucune réflexion sur la variation intra-spécifique ou sur la sélection naturelle. En revanche, le concept lamarckien d'une transformation directe des propriétés d'un être vivant par le milieu, transformation transmise ensuite héréditairement, confortait Pasteur dans ses recherches : son but était bien de trouver les conditions expérimentales « d'atténuation de la virulence » d'un microbe en changeant les conditions de culture du micro-organisme. Ce microbe, devenu inoffensif, devait ensuite protéger un individu sain contre le microbe pathogène initial. Koch n'acceptait pas ces idées, car il faisait de la virulence d'un microbe un « caractère héréditaire spécifique », insensible aux changements de milieu.
Pasteur s'attaqua d'abord aux maladies contagieuses frappant les animaux. Le choléra des poules fit l'objet de ses premières recherches parce que le développement de la maladie était très rapide (la mort survenait deux jours après l'inoculation du germe pathogène) et parce que la contagion était extrême. Le germe responsable (une bactérie pathogène) fut isolé en 1878 par deux vétérinaires, l'un italien, l'autre français, et porte aujourd'hui le nom de Pasteurella multocida. Une fois le microbe isolé, Pasteur éprouva sa virulence sur plusieurs animaux. Au contraire des poules et des lapins, les cobayes résistaient bien à l'attaque microbienne. Ce fait persuada Pasteur qu'un organisme particulier pouvait très bien résister à un microbe très virulent pour d'autres organismes. Pourtant les bactéries prélevées dans le pus d'un abcès bénin du cobaye, injectées à une poule, tuaient cet animal en moins de deux jours. Pour expliquer ces faits, Pasteur supposa que le microbe parasite trouvait dans les tissus de son hôte un oligo-élément indispensable à son développement (tels le rubidium ou le césium, récemment découverts). Si l'hôte, tels la poule ou le lapin, contenait de grandes quantités de l'oligo-élément indispensable, le germe pathogène pouvait se développer abondamment et l'animal[...]
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Écrit par
- Paul MAZLIAK : professeur honoraire de biologie cellulaire, université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie
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