LOUIS XIV (1638-1715) roi de France (1643-1715)
Louis XIV est un des personnages historiques sur lesquels l'attention demeure portée, sans que nul historien puisse prétendre donner de lui une image certaine et définitive. Qu'il ait influencé directement les destinées françaises et qu'à ce titre on ne puisse imaginer l'histoire de la France sans lui, nul doute. Mais, parce que son règne a curieusement associé une incontestable gloire à de très lourds malheurs pour la nation, il a été extrêmement loué ou critiqué et ses historiens se sont souvent partagés entre apologistes et détracteurs. On doit observer qu'il est beaucoup plus malaisé à comprendre pour des hommes de la fin du xxe siècle que pour ceux du début, parce que les profondes mutations de la société française au cours de cette période ont fait disparaître des aspects de la mentalité collective qui demeuraient, il y a soixante-dix ans encore, relativement proches du xviie siècle. En revanche, les renouvellements de la méthode historique, surtout des études érudites sur les conditions de vie en France au temps de Louis XIV, autorisent une meilleure intelligence du pays sur lequel son action s'est exercée.
La période du règne personnel s'étend de 1661 à 1715, soit pendant cinquante-quatre ans, période du gouvernement effectif du souverain. C'est par le travail que l'on règne, disait Louis XIV ; il a mis ce principe en pratique, jour après jour, par son assiduité aux affaires. Au Conseil d'en haut, véritable moteur de la monarchie, il a pris, avec un très petit nombre de ministres, les résolutions les plus importantes. Obtenir l'obéissance à l'intérieur, assurer la réputation de la France au-dehors étaient les règles essentielles de sa politique. Ses décisions avaient force de loi, elles étaient la loi même, en vertu de l' absolutisme royal, élaboré à la fois par la tradition féodale qui tenait le roi pour suprême suzerain et suprême juge et par les légistes imbus de droit romain, concevant l'autorité royale comme aussi indivisible que le point en géométrie et le roi comme arbitre, au nom de l'intérêt public, entre les divers ordres et les groupes de privilégiés (chaque groupe, même dans le tiers état, ayant ses privilèges et libertés). L'obéissance à l'intérieur signifiait donc la fidélité de la noblesse, la soumission de tous à la décision royale, la nécessité de la présence d'agents du pouvoir central (officiers et intendants).
La monarchie a ainsi reçu un caractère administratif plus marqué. Le prestige au-dehors impliquait une force militaire redoutable, afin d'appuyer les revendications vis-à-vis de l'étranger, la guerre, qui procure la gloire au vainqueur, devenant le recours normal, lorsque l'honneur est en question. À la tentation de la guerre, Louis XIV a peu résisté, mais les guerres, perdant leur caractère chevaleresque, sont devenues de plus en plus affaire de nombre, de discipline et de tactique. Elles réclamaient des sommes de plus en plus élevées au trésor royal, en fait à l'impôt. Les ressources le permettaient-elles ? Pouvait-on rendre le pays plus riche et en recueillir un impôt augmenté sans cesse, mais qui parût à la fois supportable et équitable ?
À cela s'ajoutait ce qu'on appelle aujourd'hui les réactions de mentalité collective. La fonction royale jouissait d'un rayonnement quasi religieux. Représentant de Dieu selon une conception hiérarchisée du monde, ayant reçu au sacre des charismes particuliers, le roi bénéficiait dans sa personne d'un prestige indiscutable. À une société patriarcale, il apparaissait comme le père par excellence, ses peuples étaient ses enfants. Or « les peuples se plaisent au spectacle, disait Louis XIV. Par là, nous tenons leur esprit et leur cœur. » D'où, ceci venant à la fois de la Renaissance et du caractère[...]
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Écrit par
- Victor-Lucien TAPIÉ : membre de l'Institut, professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris
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Médias
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