LOUIS XIV (1638-1715) roi de France (1643-1715)
La période de jeunesse et de succès en Europe (1661-1684)
La réforme du Conseil et les essais de Colbert
La mort de Mazarin (mars 1661) permit au jeune souverain d'entrer en scène, car il se résolut aussitôt à exercer ce métier de roi que, dans les éclairants Mémoires pour l'instruction du dauphin, il a déclaré lui-même « noble, grand et délicieux ». Des historiens d'à présent appliquent l'épithète « révolutionnaire » à ce qu'entreprit alors Louis XIV. Cela doit être entendu des incontestables changements que, pourtant traditionaliste (piété filiale envers son père, volonté de poursuivre l'œuvre des ancêtres pour l'élargir et l'améliorer), il apporta tout de suite au gouvernement effectif du royaume. Sa conviction est que le roi doit agir lui-même et que rien ne peut être décidé qu'en son nom. D'où la ferme décision d'écarter ceux à qui la naissance ou de hautes charges pouvaient prêter une autorité préjudiciable à la sienne. Délibérément, il ne souffrit plus jamais de Premier ministre, ni de prince du sang, ni de cardinal dans le Conseil du roi. Il ne rétablit jamais, à la tête de l'armée, la fonction de connétable (il la refusa encore à Villars en 1714). Après la chute de Fouquet, dont la richesse mal acquise (mais il y en avait d'autres) et l'influence sur trop de milieux éveillaient sa jalousie, il n'y eut plus de surintendant des Finances. Reste le chancelier qu'il n'a jamais supprimé ; mais il en a diminué singulièrement l'autorité, en le confinant dans la présidence du Conseil des parties, qui devint de plus en plus un tribunal administratif. Dans les différents conseils, qui étaient de véritables conseils de gouvernement (Conseil d'en haut, Conseil des dépêches, Conseil des finances), il n'admit que des commis d'origine bourgeoise. Il les comblait d'honneurs, de titres de noblesse et de richesses, mais sans que jamais on pût les confondre avec les membres de la noblesse du sang, ni oublier qu'ils étaient les « domestiques » du roi. Il fut simplement assisté dans cette entreprise par Colbert, un ancien intendant de Mazarin, très bon connaisseur du travail effectif des conseils, prodigieusement intelligent et laborieux, passionnément ambitieux et autoritaire, mais prudent et assez habile pour ne jamais lui porter ombrage. Colbert n'eut que le titre de contrôleur général des Finances, mais il réorganisa le Conseil des finances et il reçut les secrétariats d'État de la Marine, de la Maison du roi. Pratiquement, relevèrent de lui les intendants de province, tout le commerce, la navigation, les eaux et forêts et les colonies. L'armée de terre et la politique étrangère dépendaient d'autres ministres ( Le Tellier et Louvois pour la première, Lionne, Pomponne, Croissy pour la seconde), alors qu'au temps de Richelieu et de Mazarin le principal ministre connaissait de tout. Au Conseil des finances – création de Colbert – était arrêté le brevet de la taille et établi le budget, que le contrôleur général aurait voulu positif, les recettes équilibrant les dépenses ; à cause des charges générales de la monarchie, surtout les frais de la guerre et de bâtiments, cela fut bientôt impossible. Comme par le passé, le gouvernement royal ne cessa de s'endetter. La méthode de Colbert eut pour résultat que la monarchie, dans les affaires intérieures du royaume, de judiciaire devint de plus en plus administrative et fiscale, soumettant effectivement les privilèges des provinces, des communautés urbaines et rurales aux exigences du contrôle général, transmises par les intendants et leurs subdélégués. Ainsi, il y eut plus d'ordre et d'unité dans le royaume, mais au détriment de la liberté. Colbert, appliquant la doctrine mercantiliste, voulait animer la production française pour vendre au-dehors et attirer en France la plus forte quantité[...]
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Écrit par
- Victor-Lucien TAPIÉ : membre de l'Institut, professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris
Classification
Médias
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