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WEISS LOUISE (1893-1983)

Née le 25 janvier 1893 à Arras, dans une famille de la grande bourgeoisie (son père, haut fonctionnaire, appartenait à une dynastie de l'Alsace protestante ; sa mère, juive, descendante de banquiers saint-simoniens, était la fille du célèbre ophtalmologiste Émile Javal), Louise Weiss fait au lycée Molière, à Paris, des études brillantes. Elle les poursuit contre la volonté de son père, qui l'eût voulue femme au foyer, et elle se retrouve, en 1914, à vingt et un ans, agrégée de l'Université française et diplômée de l'université d'Oxford. Aussitôt, elle opte pour le journalisme.

Mais la guerre la mobilisera pendant quatre ans, au service des blessés puis des prisonniers. « De ces massacres, écrit-elle, j'émergeai en pleine jeunesse et révolte, dans un monde en ruine dont les hommes de mon âge avaient presque tous été tués. » C'est alors qu'elle entame son combat pour l'Europe et fonde, dès 1918, l'hebdomadaire L'Europe nouvelle qu'elle dirigera jusqu'en 1934. À cet organe politique de haute tenue, les esprits les plus représentatifs de l'époque vont collaborer : politiques, tels Briand, Philippe Berthelot, Herriot, Sembat, Blum, Cachin ; mais aussi poètes et écrivains : Apollinaire, Drieu La Rochelle, Maurice Genevoix, ainsi que Paul Valéry et Saint-John Perse, dont elle restera l'amie jusqu'à leur mort. Au cours de la même période, Louise Weiss est envoyée spéciale du Petit Parisien à Moscou (1921). Elle écrit un premier livre sur la République tchécoslovaque et milite pour la S.D.N.

Lucide, elle quitte L'Europe nouvelle au moment où la cause de la paix lui semble désespérée. Et c'est pour une autre cause, l'« égalité des droits politiques des Français et des Françaises », qu'elle milite dès lors, créant en 1935 l'association La Femme nouvelle. La même année, elle épouse José Imbert, architecte et musicien de talent, dont elle divorcera rapidement. Dans le climat d'angoisse qui précède la Seconde Guerre mondiale, elle prend du recul, écrit un premier roman, Délivrance, puis un ravissant livre sur sa jeunesse, Souvenirs d'une enfance républicaine, qui sera plus tard incorporé à ses Mémoires.

Elle est résistante pendant la Seconde Guerre mondiale et, dans l'après-guerre, elle parcourt le monde afin d'approfondir sa réflexion politique. De ces périples dans le Grand Nord américain, en Afrique, au Moyen-Orient et en Extrême-Orient, elle tirera une série de livres (dont L'Or, le camion et la croix, 1949 ; La Syrie, 1952 ; Le Cachemire, 1957) et surtout des films dont certains, sur la Chine, l'Inde, le Japon, le Liban et la Syrie, constituent des documents historiques et anthropologiques de premier ordre.

C'est la philosophie de ces voyages qui conduit Louise Weiss à fonder avec Gaston Bouthoul l'Institut de polémologie. Elle en sera la secrétaire générale de 1964 à 1970, date à laquelle, se séparant de Bouthoul, elle créera à Strasbourg l'Institut des sciences de la paix dans le cadre de la Fondation de France. Dans le même temps, elle achève les six volumes de ses Mémoires d'une Européenne, écrit un pamphlet inspiré par l'historien Pierre Chaunu, Lettre à un embryon (1972), publie un dernier roman en 1976.

Si elle a joué un rôle clé pour l'obtention du vote des femmes, plus que le féminisme, le centre de ses préoccupations et de son œuvre fut l'Europe, qu'elle devait retrouver à Strasbourg, au soir de sa vie (elle mourra le 26 mai 1983), et que, dans son discours d'ouverture du Parlement européen, dont elle fut la doyenne, elle avertissait d'avoir à « reprendre figure morale », sous peine de mort.

Avec ses Mémoires, eux aussi marqués au sceau de l'Europe, Louise Weiss laisse un témoignage passionné et passionnant sur une époque dont elle[...]

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