BESSON LUC (1959- )
Né en 1959, Luc Besson rencontre sur un tournage où il est jeune stagiaire le comédien Pierre Jolivet, avec lequel il écrit et produit en 1981 Le Dernier Combat. Besson filme avec très peu d'argent ce sujet de science-fiction (une humanité en haillons ou en scaphandre survit dans les ruines de quelque apocalypse nucléaire) en noir et blanc, scope et dépourvu de dialogue. Dans les années suivantes, Besson parvient à faire de cet exercice de style un film culte, si bien que Gaumont lui confie un gros budget pour réaliser, avec Isabelle Adjani comme actrice, Subway (1985), où s'agite toute une faune hantant le métro parisien. Le cinéaste impose une forme fluorescente et directe, mixant l'esthétique publicitaire avec celles des clips, un « tout-image » fondé sur la vitesse que la critique va ranger sous la bannière d'un courant néo-baroque aux côtés des réalisations de Jean-Jacques Beineix et de Leos Carax. La formule fait florès et le jeune public assure le succès.
Luc Besson devient un phénomène de société avec Le Grand Bleu (1988). Cette histoire à peine scénarisée où se mêlent ivresse des fonds marins, exploit sportif et amour romantique est racontée avec passion et sincérité, mais la mise en scène à effets tue l'émotion, la pureté et le rêve. L'enthousiasme des adolescents est néanmoins comblé par ce cinéma qui cherche à les faire « planer » grâce à la musique d'Éric Serra, aux mouvements d'appareil, aux personnages tout d'une pièce facilitant l'identification. Dès lors, le cinéaste exploite consciencieusement ce qui a fait son succès : Nikita (1990) renchérit sur la violence et la pauvreté psychologique, Atlantis (1993) sur le « trip » des profondeurs, tandis que Léon (1994) réunit l'enfant et le tueur. Réalisé aux États-Unis, Le Cinquième Élément (1997) est un spaceopera mi-ludique, mi-parodique, tandis que Jeanne d'Arc (1999) se présente comme une image d'Épinal, mais sanglante et spectaculaire.
Visiblement le public est toujours au rendez-vous. Mais Besson ne prend plus le même plaisir à l'exercice de la mise en scène. Dès 1986, il avait écrit et produit Kamikase (Didier Grousset). C'est cette double activité qui va l'occuper désormais en priorité à la tête d'Europa Corp, société de production et de distribution qu'il crée à l'orée du IIIe millénaire, en même temps qu'il écrit des livres pour les enfants (la série Arthur). Il annonce alors qu'Angel A (2005, rencontre d'un escroc suicidaire – Jamel Debbouze – et d'une aventurière aux pouvoirs mystérieux, suite de belles images glacées sans grande consistance) sera son dernier film. Il n'en donne pas moins une trilogie d'animation, entièrement réalisée en France et tirée de ses livres : Arthur et les Minimoys (2006) ; Arthur et la vengeance de Maltazard(2009) ; Arthur 3 -La Guerre des deux mondes (2010). Suivront une adaptation des Aventures extraordinaires d’Adèle Blanc-Sec (2010), d’après l’œuvre de Tardi, The Lady (2011), inspiré de la vie d’Aung San Suu Kyi, et Malavita (2013). Lucy (2014), qui mêle « polar » et science-fiction, permet au metteur en scène de renouer avec le succès du Cinquième Élément.
De toute évidence, Luc Besson veut faire revivre le modèle qui était celui des anciens nababs hollywoodiens : construire des studios (ce qu’il fera en 2012 avec la Cité du cinéma, à Saint-Denis), diriger des centaines de personnes, donner les idées et posséder le final cut sur de nombreux films aux visées purement commerciales tournés simultanément. Ainsi lance-t-il le concept de Taxi (comédie d'action et de cascades avec Samy Nacéri au volant de son taxi à Marseille) : quatre films ont été réalisés (le premier par Gérard Pirès, les trois autres par Gérard Krawczyk, en 1997, 2001, 2003, 2007), écrits et[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- René PRÉDAL : professeur honoraire d'histoire et esthétique du cinéma, département des arts du spectacle de l'université de Caen
Classification