LUCIA DI LAMMERMOOR (G. Donizetti)
Dramma tragico en trois actes de Gaetano Donizetti sur un livret de Salvatore Cammarano, Lucia di Lammermoor est créé triomphalement au Teatro San Carlo de Naples le 26 septembre 1835. Avec Norma de Vincenzo Bellini, Lucia di Lammermoor constitue l'autre sommet du romantisme italien pré-verdien. La renommée de l'œuvre repose notamment sur le sextuor vocal de son deuxième acte, l'un des ensembles les plus réussis de la première moitié du xixe siècle – qui bouleversera Emma Bovary –, et sur la scène de la folie de son troisième acte, la plus fameuse de toute l'histoire de l'opéra italien, prisée des grandes sopranos colorature, d'Adelina Patti et Nellie Melba à Maria Callas ou Joan Sutherland.
Salvatore Cammarano s'est inspiré pour son livret du roman de Walter Scott The Bride of Lammermoor (1819) mais aussi des adaptations que celui-ci avait déjà suscitées : une « pièce héroïque » de Victor Ducange, La Fiancée de Lammermoor (1828), et trois livrets, ceux de Giuseppe Balocchi pour Le Nozze di Lammermoor (1829) de Michele Carafa, de Calisto Bassi pour La Fidanzata di Lammermoor (1831) de Luigi Rieschi, et de Pietro Beltrame pour La Fidanzata di Lammermoor (1834) d'Alberto Mazzucato. Comme à son habitude, Donizetti, à qui l'on doit quelque soixante-dix ouvrages lyriques, écrit très rapidement Lucia di Lammermoor : il en entame la composition à la fin de mai 1835 et la dernière page de la partition porte la date du 6 juillet.
Lors de la création, les rôles principaux sont tenus par de prestigieux interprètes : la soprano Fanny Tacchinardi-Persiani (Lucia), le ténor Gilbert Duprez (Edgardo), le baryton Domenico Cosselli (Enrico) et la basse Carlo Porto (Raimondo). Donizetti donnera une version de son ouvrage en français (dans une traduction d'Alphonse Royer et Gustave Vaëz, avec une partition remaniée), Lucie de Lammermoor, créée le 6 août 1839 au Théâtre de la Renaissance (Salle Ventadour), à Paris, avec Sophie Anne Thillon dans le rôle titre.
Argument
Des divergences peuvent apparaître lors des représentations de l'œuvre, dont il existe de nombreuses versions, avec notamment des interversions ou des suppressions de scènes.
L'action se passe en Écosse, à la fin du xviie siècle.
Acte I. Au petit matin, Enrico Ashton, Lord de Lammermoor (baryton), accompagné de son maître d'armes Normanno (ténor) et de son chapelain Raimondo Bidebent (basse), ordonne à ses hommes de fouiller les alentours des ruines du château de Ravenswood car on lui a signalé la présence d'un inconnu rôdant dans les parages. Resté avec ses proches, il leur confie ses tourments : sa sœur Lucia refuse la main de Lord Arturo Bucklaw, qui pourrait assurer la fortune de sa famille, que de mauvais choix politiques ont mise en péril. Normanno lui révèle que Lucia aime en secret Edgardo, seigneur de Ravenswood, dont Enrico a usurpé les terres et qui est un ennemi juré de sa famille. Enrico laisse éclater sa haine et sa colère, que vient renforcer la confirmation de ses soupçons : le mystérieux rôdeur n'est autre qu'Edgardo lui-même (air de fureur d'Enrico « Cruda, funesta smania » : « Cruelle, funeste colère » puis cabaletta de vengeance « La pietade in suo favore » : « La pitié en sa faveur »). Raimondo l'invite vainement à l'indulgence.
Peu après, au bord d'une fontaine, dans le parc du château de Lammermoor, Lucia (soprano), accompagnée de sa suivante Alisa (mezzo-soprano), attend Edgardo. Sa suivante la met en garde contre les risques qu'elle encourt. Lucia évoque la légende d'une jeune fille qui aurait été assassinée par un Ravenswood et dont elle croit avoir aperçu le fantôme (cavatine « Regnava nel silenzio » : « Le silence régnait »), mais, pleine de son amour pour Edgardo, elle n'accorde pas d'importance à l'interprétation funeste qu'Alisa fait de cette légende (cabaletta[...]
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Écrit par
- Timothée PICARD : ancien élève de l'École normale supérieure et de Sciences Po Paris, assistant à l'université Marc Bloch (Strasbourg), critique musical
Classification
Média