FABRO LUCIANO (1936-2007)
Mort à Milan en juin 2007, Luciano Fabro est l'un des protagonistes majeurs de l'arte povera, qui regroupe, à la fin des années 1960, un cercle de créateurs italiens parmi les plus novateurs de l'époque. Si l'artiste participe à l'ensemble des manifestations du groupe, il n'en mène pas moins une démarche personnelle souvent déroutante. Faisant du corps de l'artiste et de la participation du spectateur les éléments prédominants de l'œuvre, il n'en néglige pas pour autant l'histoire de la culture italienne. À partir de matériaux les plus insolites comme les plus classiques, cette donnée corporelle de base se conjugue à nombre de sollicitations concernant toute une série de perceptions visuelles en relation avec l'espace.
Né à Turin en 1936, Luciano Fabro est d'abord peintre. En 1959, il s'installe à Milan. Il se lie d'amitié avec Piero Manzoni et admire Lucio Fontana dont la conception de l'espace lui permet de définir l'un des principes majeurs de ses créations. En 1965, la galerie Vismara, à Milan, organise sa première exposition personnelle. Il y présente Buco (le trou), constitué d'une plaque de verre au centre de laquelle une image réticulée réfléchissante ménage une percée à hauteur du regard. « C'est la première œuvre, écrit Fabro, qui résulte de la compénétration de deux espaces opposés, l'espace qui fait face au miroir et celui qui est derrière lui. » Il rédige une notice pour chaque pièce ainsi qu'une introduction pour le catalogue. Fabro souhaite par là établir personnellement le lien entre l'œuvre et le discours théorique susceptible de l'accompagner. De la même manière, il participe activement à la conception et à la mise en place de ses expositions.
En 1967, l'année de la participation de Luciano Fabro à la première des expositions Arte povera – In spazio, l'artiste réalise In cubo. Il s'agit d'un cube de toile à cinq faces, le côté ouvert étant posé sur le sol. Réalisé selon les mesures de l'artiste, il peut se percevoir de l'extérieur comme une œuvre minimale, ou devenir pénétrable lorsque le spectateur le soulève et s'y installe. Il comprend alors, écrit Fabro, « ce que cela signifie de pénétrer à l'intérieur. Le spectateur ne doit pas être seulement un spectateur, mais aussi le spectateur de lui-même, et l'œuvre est un filtre entre lui et les autres ».
Dès lors, Luciano Fabro expérimente nombre de formes dont certaines sont liées à la tradition de l'art italien, tandis que d'autres sont de pures inventions, nées des tensions et des recherches d'un esprit en perpétuelle ébullition. À partir de l968, il réalise les Piedi (Musée national d'art moderne, Centre Georges-Pompidou Paris), dont il présente un ensemble spectaculaire, en 1972, à la biennale de Venise. Ces objets de fascination, dont on ne sait à quelles espèces ils appartiennent, sont réalisés en marbre, en verre ou en bronze et semblent les colonnes insolites d'un temple dont le revêtement serait fait des étoffes les plus somptueuses. Comme La Nascita di Venere (La Naissance de Vénus, 1992, Bonnefanttenmuseum, Maastrich), ils déroutent par une modernité évidente, associée à la sculpture baroque du Bernin ou de Borromini. À la même époque, Fabro entreprend la série des Itali, qu'il exploite en nombre. De l'Italia d'oro (1971, Musée d'art contemporain, Los Angeles) à l'Italia all'asta (1994, Castello di Rivoli, Turin), elles vont envahir et pour longtemps, comme les Piedi, les expositions de Fabro. Suspendues au plafond, posées au sol, réalisées dans toutes sortes de matériaux, elles jouent sur une certaine image de la péninsule et remettent en cause les fondements et l'histoire d'une nation. Entre 1976 et 1984, Fabro peint les [...]
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Écrit par
- Maïten BOUISSET : critique d'art
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ARTE POVERA
- Écrit par Maïten BOUISSET
- 1 637 mots
- 1 média
Très rapidement adoptée par le monde de l'art, la terminologie Arte povera a été inventée par l'historien et critique Germano Celant à l'occasion d'une exposition organisée à Gênes en septembre 1967, pour désigner l'émergence, en Italie, d'un ensemble de nouvelles pratiques artistiques. « Ceci,...