CHILDS LUCINDA (1940- )
Vers le minimalisme
Née le 26 juin 1940 à New York, Lucinda Childs commence par étudier le piano et seulement un peu la danse avec des professeurs prestigieux tels que Hanya Holm, Helen Tamiris ou Mia Slavenska. C'est en voulant poursuivre un cursus de théâtre au Sarah Lawrence College qu'elle rencontre Bessie Schönberg, Merce Cunningham et Judith Dunn qui vont infléchir définitivement son parcours. Lucinda Childs entre dans l'école de Cunningham tandis que Judith Dunn la pousse à suivre les cours de composition de son mari, Robert Dunn. Là, le bouillonnement intellectuel d'une toute jeune avant-garde new-yorkaise la captive : Trisha Brown, Steve Paxton et Yvonne Rainer sont en train de renouveler le champ chorégraphique en déconstruisant la modern dance dans un mouvement qui restera célèbre sous le nom de chorégraphes de la Judson Church. Le post-modernisme dans la danse était né. Son credo : ne plus utiliser de vocabulaire chorégraphique mais s'inspirer de tâches quotidiennes ou ordinaires, briser la hiérarchie des rapports entre danseur et chorégraphe ou entre artistes et spectateurs ; s'affranchir de toute narration, de toute émotion, du narcissisme lié au ballet. Sur cette lancée, Lucinda Childs crée treize pièces entre 1962 et 1966 où elle manipule toutes sortes de matériaux, profère des paroles, compréhensibles ou non.
Soudain elle arrête la danse. Elle se sent brisée, au terme d'une recherche qui ne la satisfait plus. Elle déménage, termine une maîtrise en sciences de l'éducation et devient institutrice. Toutefois, elle se remet peu à peu à danser, mais différemment. Elle reprend des cours selon la méthode Alexander et fait une incursion sur scène en 1968. Elle commence à se décrire comme « minimaliste ». Il faut cependant attendre 1972 pour que sa carrière chorégraphique reprenne avec un trio où les danseuses semblent des corps célestes projetés dans un vide stellaire au gré d'orbites savamment calculées.
Finalement, elle crée sa compagnie en 1973 qui débute au Whitney Museum de New York puis se produit dans des lieux alternatifs jusqu'en 1976, date à la fois de son succès dans Einstein on the Beach et de sa première pièce très marquante : Radial Courses. Dans cette œuvre radicale, sans musique, d'une austérité toute euclidienne en pleine période pop, elle exploite jusqu'à l'ossature un mouvement enfermé dans un espace circulaire créé par des danseurs qui tournent en rond. Marches, petites foulées, galops légers : le mouvement continu se fait et se défait sans cesse en trajectoires cristallines, révélant, au fur et à mesure qu'il se construit, une myriade de permutations au sein d'un leitmotiv au rythme infernal. Une chorégraphe au style inimitable est née, et avec elle, la danse répétitive. La structure de la danse devient, grâce à elle, le sujet même du spectacle chorégraphié. Les formes et les mouvements du corps passent au second plan pour faire ressortir une construction de l'espace et du temps.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Agnès IZRINE : écrivaine, journaliste dans le domaine de la danse
Classification
Média
Autres références
-
BALLET
- Écrit par Bernadette BONIS et Pierre LARTIGUE
- 12 613 mots
- 21 médias
...expérimente la gravité sur les mouvements de la marche le long de parois verticales d'immeubles et l'effet produit par l'accumulation de mouvements, tandis que Lucinda Childs s'intéresse à leur répétition. Steve Paxton invente une nouvelle technique, le contact improvisation, fondé sur le contact des... -
LA MALADIE DE LA MORT (M. Duras)
- Écrit par Frédéric MAURIN
- 1 322 mots
Créée à la Schaubühne de Berlin en 1991, dans une traduction de Peter Handke, la mise en scène de La Maladie de la mort par Robert Wilson a dû attendre sa reprise au Théâtre Vidy-Lausanne, en 1996, pour être jouée dans le texte original de Marguerite Duras. Cette seconde version du spectacle,...