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MURATORI LUDOVICO ANTONIO (1672-1750)

Écrivain et grand érudit italien, fondateur de l'historiographie moderne, né le 21 octobre 1672 à Vignola (Modène), mort le 23 janvier 1750 à Modène, Ludivico Antonio Muratori se forme à la méthode historique critique des mauristes français auprès de l'illustre liturgiste bénédictin Benedetto Bacchini, à Modène. Ordonné prêtre en 1694, il devient préfet de la Bibliothèque ambrosienne de Milan. C'est à cette époque qu'il publie les deux premiers tomes des Anecdota (1697-1698, « Les Anecdotes ») – recueil de textes découverts parmi les manuscrits de la bibliothèque, qui sera complété en 1713 par deux autres volumes. En 1700, il revient à Modène pour exercer la charge de bibliothécaire et archiviste à la cour ducale de Rinaldo Ier. Les litiges qui opposent la maison d'Este et le Saint-Siège sur la question de la propriété du territoire de Comacchio vont l'amener à se plonger, documents originaux à l'appui, dans l'examen d'un certain nombre de problèmes juridiques et idéologiques du Moyen Âge italien. Muratori conclut de ses recherches que cette période est au fondement de l'État moderne, même si, en homme du xviiie siècle, il continue à souscrire à l'idée qu'il s'agit d'une époque « barbare ». Se lançant alors dans l'exploration des archives disponibles, il s'adjoint la collaboration efficace de correspondants locaux pour compiler, dans ses Rerum Italicarum Scriptores, (28 vol., 1723-1751, « Chroniqueurs de la vie italienne »), chroniques, annales, journaux et documents juridiques illustrant l'histoire de la société médiévale italienne.

Parallèlement, Muratori travaille à la rédaction des Antiquitates Italicae Medii Aevi (6 vol., 1738-1742, « Antiquités de l'Italie médiévale »). Figure, parmi ces soixante-quinze dissertations, le Canon de Muratori, qui recense les écrits du Nouveau Testament tenus pour canoniques par l'Église du iie siècle. Muratori livre là son œuvre historique la plus haute en couleur et la plus perspicace, qui examine, avec beaucoup de finesse et force détails, des sujets allant de l'histoire des institutions à l'économie, en passant par la religion et les usages sociaux. Tel est notamment le cas de l'analyse et de la mise en évidence critiques, et en toute indépendance, des relations entre événements sociaux et traditions religieuses. Muratori commence ensuite à publier les Annali d'Italia (12 vol., 1744-1749, « Annales d'Italie »). Si ce cycle d'ouvrages revêt un certain intérêt au regard de la tentative de son auteur de retracer l'histoire de la péninsule italienne comme une entité unifiée, il se résume cependant, dans l'ensemble, à un exercice peu probant du point de vue historiographique. Il semble que sa démarche analytique ne vise qu'à pallier l'absence de thème dominant, et les portraits manquent de subtilité, notamment s'agissant des détails psychologiques : Muratori a apparemment une meilleure compréhension des groupes humains et de leurs besoins que des individus.

Historien, Muratori est aussi un homme de lettres attentif aux rapports entre culture et principes moraux, et c'est, selon lui, au critique qu'il incombe de les mettre en exergue, ainsi qu'en témoignent ses Riflessioni sopra il buon gusto (1708, « Réflexions sur le bon goût »). En tant que prêtre, Muratori combat la superstition et dénonce la scolastique médiévale mise à l'honneur par les jésuites, tant pour des raisons d'ordre culturel que moral. Il est même taxé de jansénisme – courant théologique catholique d'inspiration dissidente. Bien qu'infondée, cette accusation s'appuie sur l'affinité apparente entre sa lutte en faveur d'un retour à la morale et la doctrine janséniste. Au reste, il s'en rapprochera ultérieurement par son adhésion claire aux idées sur la souveraineté[...]

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  • COULEURS, histoire de l'art

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    ...musiva..., manuscrit probablement rédigé à l'époque de Charlemagne, découvert à Lucques et publié seulement au xviiie siècle à Milan par Ludovico Antonio Muratori. Il s'agit là du texte résumant le mieux le développement de la technique de la mosaïque et les effets de transparence...
  • ILLUMINISMO

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    La spécificité de la philosophie des « Lumières » en italie se manifeste, sous l'appellation d'Illuminismo, par le relatif abandon de la spéculation métaphysique et de la recherche scientifique par la pensée philosophique. L'époque précédente avait été dominée par la philosophie...