TIECK LUDWIG (1773-1853)
Le nouvelliste et le critique théâtral
De 1804 à 1813, Tieck subit une grande crise de dépression. Le cercle romantique s'est disloqué. La maladie, un rhumatisme déformant, va bientôt river Tieck à son fauteuil. Le manque d'argent l'oblige à chercher refuge chez des châtelains prussiens marqués par l'esprit romantique. En 1819, il s'installe à Dresde avec sa femme et la comtesse Henriette von Finkenstein, qui présidera à ses célèbres « lectures » d'ouvrages dramatiques dans un salon devenu à juste titre une des attractions intellectuelles de la Saxe, voire de l'Allemagne.
Ses Nouvelles (Novellen) sont le tableau sensible, parfois satirique, toujours feutré de cette société de bourgeois et d'aristocrates libéraux. D'autres récits, jadis célèbres, évoquent la vie de Shakespeare (1826-1831) et de Camões (1834) ou bien exposent avec une grande pénétration psychologique, mais sous une forme déjà surannée, la genèse des fanatismes religieux : La Révolte des Cévennes (Der Aufruhr in den Cevennen, 1826), Le Sabbat des sorcières (Der Hexensabbat, 1832). La notoriété de Tieck est alors grande en France, notamment auprès de Nodier, de Sainte-Beuve, de Balzac, de Musset, où il passe toujours pour le chef de l'école romantique. Longfellow et Poe, de leur côté, se sont enthousiasmés pour lui.
Il termine sa carrière en 1840 par un chef-d'œuvre : Vittoria Accorombona, roman historique consacré à la poétesse de la Renaissance, qui est glorifiée comme type de la femme libre. Éléments du roman noir et brûlants souvenirs romantiques sont ici captés sous une forme assez proche du classicisme goethéen par la rigueur concertée.
En 1842, le roi de Prusse appelle Tieck comme conseiller théâtral honorifique à Berlin où il meurt en 1853.
Parmi ses nombreuses traductions, le Don Quichotte de 1799 et le Théâtre de Shakespeare (1826-1833), établi en collaboration avec A. G. Schlegel et Dorothée Tieck, brillent d'un éclat particulier. Ses commentaires scéniques du théâtre élisabéthain ont de leur côté marqué une date. À son actif, enfin, d'importantes éditions de textes allemands du Moyen Âge, des xvie et xviie siècles des œuvres de Lenz, de Maler Müller, de Novalis, de Kleist, de Solger, qui sont autant de « résurrections » dues au flair d'un grand lettré et à la ferveur d'un ami sûr.
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Écrit par
- Robert MINDER : professeur au Collège de France
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