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COMENCINI LUIGI (1916-2007)

Mort à Rome à plus de quatre-vingt-dix ans, Luigi Comencini, malade, avait interrompu sa carrière depuis une quinzaine d'année. Ses filles, Paola, Cristina et Francesca, tout en commençant leur propre carrière, l'avaient aidé à tourner ses derniers films. Bien que né en Italie, à Salò, au bord du lac de Garde, le futur metteur en scène a passé son enfance et son adolescence à Agen, où il découvre le cinéma en fréquentant les salles de la ville. De retour en Italie, il obtient en 1939 son diplôme d'architecte au Politecnico de Milan. Durant ces années, il recueille de vieux films avec Mario Ferrari et Alberto Lattuada. Cette collection donnera naissance en 1947 à la Cineteca Italiana. Critique, photographe, journaliste, le cinéma est sa passion. Après le court-métrage Bambini in città (1946), qui lui vaut immédiatement un Nastro d'argento, il signe en 1948 son premier long-métrage, Proibito rubare (De nouveaux hommes sont nés), sur l'enfance délinquante à Naples. Une quarantaine de films suivront, qui feront de lui le cinéaste des enfants et des humbles.

Pour un cinéma populaire

De la filmographie de Comencini se dégage une impression d'unité qui dépasse l'apparent éclectisme d'œuvres relevant de genres différents. Son univers trouve ses racines dans une profonde attention aux suggestions de la réalité. Comencini a toujours possédé une claire conscience de la nature du cinéma. Son texte célèbre, « En guise d'autoportrait », est de ce point de vue éclairant. Parlant devant ses anciens condisciples de l'école d'architecture de Milan, il notait : « Une maison est tout d'abord un objet à habiter, fait à la mesure de l'homme ; un film est avant tout un spectacle destiné à un public populaire. La complaisance esthétique pour elle-même est la dégénérescence de l'architecture, et il en va de même pour le cinéma. Ne pas tenir compte des raisons pour lesquelles se fait le film, c'est le trahir. »

Ces affirmations – véritable profession de foi – mettent en évidence le souci extrême de concevoir les films en fonction du public auquel ils sont destinés. Comencini a toujours accepté de travailler à l'intérieur du système de production. Toute sa carrière sera marquée par des hauts et des bas qui sont la conséquence de ce choix initial : mener le combat à l'intérieur des structures et accepter parfois les films de compromis voulus par les producteurs. Ainsi, au cours des années 1950, les œuvres personnelles alternent avec les œuvres de commande. Si La finestra sul luna park (Tu es mon fils, 1956) est une remarquable étude sur les souffrances de l'enfance dans un contexte de séparation des parents, les autres entreprises appartiennent au cinéma de genre. Le cinéaste navigue entre le mélodrame (Persiane chiuse, 1951 ; La tratte delle bianche, 1953) et la comédie populaire ; il est même accusé d'être le fossoyeur du néo-réalisme avec le diptyque que forment Pain amour et fantaisie (1953), et Pain amour et jalousie (1954). En revanche, La Belle de Rome (1955) annonce une évolution vers plus d'approfondissement : les chefs-d'œuvre du début des années 1960 ne sont pas loin.

En effet, avec Tutti a casa (La Grande Pagaille, 1960), A cavallo della tigre (À cheval sur le tigre, 1961), Il commissario (1962), Comencini trouve un équilibre délicat dans l'art de traiter de façon humoristique des sujets très graves. Quant à La ragazza di Bube (1963), adapté du roman de Carlo Cassola, il s'agit d'une des évocations les plus convaincantes des traumatismes subis par l'Italie aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale. Au cours de cette décennie, il réalise encore L'Incompris (1966) et Casanova, un adolescent à Venise (1969) qui confirment son génie dans la représentation des souffrances de l'enfance. À cet égard, il[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite, université professeur émérite, université Paris I-Panthéon Sorbonne

Classification

Autres références

  • COMÉDIE ITALIENNE, cinéma

    • Écrit par et
    • 3 496 mots
    • 3 médias
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