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QUIÑONES DE BENAVENTE LUIS (1593?-1651)

Né à Tolède, Quiñones de Benavente abandonne vers 1640, au terme d'une carrière féconde, le monde du théâtre, dont il était l'une des figures majeures, pour se faire prêtre. Son nom reste pourtant attaché au Género Chico, genre théâtral qui, loin d'être mineur, jouait un rôle essentiel dans les corrales du xviie siècle. Les trois actes d'une comedia, fût-elle de Lope ou de Calderón, ne connaissent, en effet, le succès que si les séquences récitées, chantées ou dansées qui les encadrent participent à cette réussite. Quiñones de Benavente est le spécialiste reconnu de ces introductions (loas), intermèdes (entremeses), danses (bailes) ou formes mixtes comme les jácaras ; ses contemporains s'accordent pour dire que « toutes les bonnes comédies lui doivent d'être meilleures, les mauvaises de ne le point paraître ». Les œuvres parvenues jusqu'à nous — en particulier le recueil de la Jocoseria (1645) — témoignent de la grande virtuosité de Quiñones dans le traitement des situations dramatiques et dans la création des personnages typiques de ce répertoire (alcaldes, sacristains, médecins, aventurières...). Quiñones de Benavente joue avec finesse sur tous les registres du langage, et montre, par l'emploi de la musique et de la chorégraphie, sa maîtrise des techniques du spectacle. D'ailleurs, une grande part de son œuvre, qui appartient plutôt à l'histoire de la musique ou de la comédie musicale, préfiguration de la zarzuela, ne peut plus être appréciée pleinement à cause de la disparition des partitions. L'analyse des dialogues et des paroles des chansons permet de comprendre pourquoi ses contemporains ont vanté le bon goût et la retenue de Quiñones dans la mise en scène de cette comédie humaine réduite aux dimensions de l'intermède : satire aimable des travers « humains » — en cela Quiñones est un classique — ou moralité allégorique sur le mode plaisant lorsqu'il faut accompagner un auto religieux. Commande pour une fête royale, ou encore monologue destiné à un acteur, le théâtre de Quiñones est nettement marqué par les diverses circonstances de sa composition. Mais l'impression de liberté surveillée qu'il laisse n'est pas le fait des seules lois du genre. Plus encore que sur l'ensemble de la comedia la censure veille en effet sur les intermèdes et les danses, surtout dénoncées par les garants de l'ordre moral. C'est pourquoi, lorsque Quiñones de Benavente reprend l'argument du Retable des merveilles cervantin, il substitue à l'impitoyable lumière que jette Cervantès sur la mentalité des vieux-chrétiens, épouvantés à l'idée d'être nés juifs, la satire anodine des maris craignant une infortune conjugale. Au terme de l'itinéraire suivi par un genre théâtral d'abord porteur de turbulence frondeuse et carnavalesque, l'œuvre de Quiñones de Benavente marque un achèvement autant qu'un affadissement. Il en reste les échos d'une fête, lointaine désormais, dont il fut le brillant ordonnateur.

— Bernard GILLE

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Écrit par

  • : agrégé d'espagnol, maître assistant à l'U.E.R. d'études ibériques de l'université de Paris-IV

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