LUMIÈRE
Interaction lumière-matière
Il est aisé de comprendre au premier degré par quel procédé un objet – rouge par exemple – nous apparaît d'une certaine couleur. Éclairée par de la lumière dite blanche (comme celle du soleil ou d'une ampoule), il ne renvoie vers notre œil qu'une partie du rayonnement incident – les composantes rouges de la lumière. Les autres composantes sont absorbées ou diffusées dans d'autres directions (un objet blanc renverrait toute la lumière, un objet noir l'absorberait entièrement).
Dans le cas de l'absorption, que se passe-t-il à l'échelle des constituants de l'objet ?
Au début du xxe siècle, les physiciens ont opéré une quantification de la lumière mais également de la matière. La matière est composée d'atomes, eux-mêmes formés d'un noyau, chargé positivement, et d'électrons. En fonction des positions occupées dans l'espace par ces électrons, on définit des niveaux d'énergie de l'atome (l'énergie ne peut pas prendre n'importe quelle valeur : ces niveaux sont discrets). Pour passer d'un niveau d'énergie à un autre, un atome a besoin de recevoir exactement la quantité d'énergie qui correspond à l'écart entre ces deux niveaux. Ni moins, ni plus. La lumière transporte des photons dont l'énergie est déterminée par la fréquence (ou la longueur d'onde). Si cette énergie est égale à l'écart entre deux niveaux atomiques, alors le photon sera absorbé et l'atome sera excité. À l'inverse, si l'énergie du photon est trop petite, mais également si elle est trop grande, le photon ne sera pas absorbé. Cela est la base de la spectroscopie d'absorption.
Typiquement, l'excitation d'un atome de son état fondamental vers les premiers états excités correspond à l'absorption de photons dans le domaine visible ou proche ultraviolet. Ainsi, si l'on éclaire une vapeur d'atomes métalliques avec de la lumière blanche et que l'on observe la lumière à la sortie, on constate qu'il manque certaines fréquences, qui ont été absorbées par les atomes. De même pour le spectre solaire : dès 1814, Joseph von Fraunhofer observa que certaines composantes spectrales manquaient, que l'on attribua plus tard à l'absorption par certains éléments constitutifs du Soleil. On analyse encore ainsi la composition superficielle des étoiles.
La matière qui nous entoure est plus généralement formée de molécules, qui sont elles-mêmes des assemblages d'atomes. Il existe des niveaux électroniques dans ces molécules, mais également d'autres types de niveaux – vibrationnels et rotationnels – qui peuvent être également excités avec des photons moins énergétiques que les états électroniques – infrarouge et micro-ondes.
Ainsi, le spectre d'une molécule – à savoir la façon dont elle absorbe ou non la lumière suivant la longueur d'onde de celle-ci – est une empreinte caractéristique de cette molécule. On peut ainsi utiliser la lumière comme outil d'analyse pour détecter la présence de molécules dans des milieux aussi divers que l'atmosphère des villes, les flammes d'un réacteur, ou le milieu interstellaire à des années-lumière de notre planète.
La spectroscopie d'émission est complémentaire de la spectroscopie d'absorption : un atome ou une molécule excité(e) retourne à son état fondamental en émettant un photon, caractéristique des états électroniques (et/ou vibrationnels et rotationnels) de l'atome ou de la molécule. La fréquence d'émission (donc l'énergie) du photon émis est bien souvent inférieure à celle du photon initialement absorbé dans le cas d'une molécule. Il existe des processus – dits non radiatifs – qui permettent à la molécule de se désexciter dans un premier temps sans émettre de lumière, puis d'émettre[...]
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Écrit par
- Séverine MARTRENCHARD-BARRA : chargée de recherche au C.N.R.S., Institut des sciences moléculaires d'Orsay, université de Paris-XI
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